Hommage

Qui était le baron Vitta ?

Par Maureen Marozeau · Le Journal des Arts

Le 11 mars 2014 - 475 mots

Le Palais Lumière, à Evian, salue l’un des habitants de la ville lacustre,
le baron Joseph Vitta, mécène et collectionneur resté dans l’ombre.

ÉVIAN - Avec « Rodin. Les Arts décoratifs » en 2009, William Saadé, conservateur en chef émérite du patrimoine, et François Blanchetière, conservateur au Musée Rodin, avaient livré une exposition parmi les plus réussies depuis le réaménagement en 2006 du Palais Lumière, à Évian-les-Bains (Haute-Savoie). Aujourd’hui, le duo récidive avec un hommage à Joseph Vitta (1860-1942), suite logique à leur travail. Mécène d’Auguste Rodin, auquel il a commandé plusieurs bas-reliefs et différents ornements pour ses résidences, le baron Vitta est une figure indissociable du patrimoine artistique d’Évian. La Sapinière, villa familiale située au bord du lac Léman dont il a assuré la décoration, offre le condensé de son goût affirmé pour un classicisme contemporain, teinté d’un soupçon d’Art nouveau : Alexandre Falguière pour les ornements en terre cuite sur la façade, Rodin pour habiller le vestibule, Albert Besnard et Jules Chéret pour les décors peints, Félix Bracquemond et Alexandre Charpentier pour le mobilier dans la salle de billard…

Généreux donateur
Marchand juif d’origine italienne tenu à la marge de l’intelligentsia parisienne, Joseph Vitta est un homme difficile à saisir. Malgré ses dons importants aux Musée des beaux-arts Jules-Chéret et Musée des arts asiatiques à Nice, et sa participation à la création du Musée national Eugène-Delacroix, à Paris, ce personnage discret est resté dans l’ombre. Aucune archive ni facture ou registre des collections voire article de presse n’ont été retrouvés. Seuls subsistent la documentation institutionnelle associée aux dons et les catalogues de vente qui ont accompagné les trois étapes de la dispersion aux enchères du reste de sa collection, dans les années 1920 et 1930. Le jeu de piste s’est donc imposé pour remettre la main sur les œuvres passées entre les siennes.

Faisant preuve d’une belle rigueur scientifique, le parcours évoque chaque artiste de la constellation Vitta : Delacroix, Ingres, Rodin, Bracquemond, Chéret. À eux deux, l’exposition et son catalogue parviennent à dresser le portrait de ce collectionneur enragé, dont on oublie qu’il vendit La Mort de Sardanapale au Louvre – Évian en présente une esquisse.

Une large partie de l’exposition est consacrée aux plans et projets décoratifs de la Sapinière, aussi une visite sur place s’impose-t-elle. Dévolue, selon la volonté de sa sœur Fanny, à une association agissant en faveur de la réinsertion des personnes handicapées, la villa et ses décors accusent le coup d’un manque de moyens chroniques pour leur restauration et leur entretien. Avis aux mécènes.

Joseph Vitta, Passion de collection

Jusqu’au 1er juin, Palais Lumière, quai Albert-Bresson, 74500 Évian
tél. 04 50 83 15 90, www.ville-evian.fr, tlj 10h-19h, 14h-19h le lundi.
Catalogue, coéd. Ville d’Évian/Somogy, 272 p., 35 €.
Visites commentées de la villa La Sapinière, Fondation Foa (L’Adapt), 20, av. de Noailles, Évian, 9h-12h le vendredi, 16h-17h le mercredi.

Légende photo

Jules Chéret, Portrait du baron Vitta, 1908, pastel, 65,5 x 45 cm, Musée des Beaux-Arts, Nice. © Photo : Muriel Anssens/Ville de Nice.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°409 du 14 mars 2014, avec le titre suivant : Qui était le baron Vitta ?

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