Mode et peinture

Picasso-Lacroix, l’autre rencontre d’Arles

Par Suzanne Lemardelé · Le Journal des Arts

Le 19 juin 2012 - 512 mots

Au musée Réattu, les créations pour le théâtre de Christian Lacroix sont un hommage aux figures de l’œuvre de Picasso.

ARLES - Entre Christian Lacroix et le musée Réattu, c’est une histoire qui dure. Depuis 1957, d’après le couturier, date à laquelle il se souvient d’y avoir vu sa première exposition Picasso. Il a alors six ans et le choc esthétique qu’il ressent l’imprègne « pour la vie ». Un demi-siècle plus tard, lorsque la directrice de l’établissement lui propose d’exposer ses créations face aux œuvres du maître, sa première réaction est pourtant de refuser. Trop ambitieux, le pari l’effraie. Puis vient le temps de la réflexion. Il connaît les lieux, pour les avoir déjà investis en 2008 lors de l’exposition Musée Réattu, Christian Lacroix ; et à bien y penser, les costumes qu’il crée pour le théâtre sont marqué de références picassiennes. Ménines, arlequins, toreros… Le jeu de miroirs entre dessin et couture se met en place. Il clôt de belle manière le nouvel accrochage temporaire du musée, intitulé Acte V, un hommage au théâtre, à ses décors et ses illusions.

De sa première hésitation, Christian Lacroix tire un parti pris scénographique : pas question de comparaison, la star de l’exposition reste Picasso. Dans la première salle trône son Portrait de Lee Miller en Arlésienne (1937) ; dans la chapelle qui lui fait face, le Portrait de Maria Picasso Lopez (1923). Ces deux toiles sont les seules que possède le musée, le reste du fonds Picasso étant composé de dessins offerts par l’artiste au début des années 1970. Autour d’elles, Lacroix fait ce qu’il sait si bien faire : il brode. Des portraits, il ne garde que les cheveux, et oppose à la sévère figure de Madame Picasso les fantaisistes perruques de plumes et dentelles conçues pour le Candide de Bernstein en 2011. Face à la série des « Mousquetaires » (1971), il propose sa version XVIIe siècle : celle des costumes du Cyrano de Bergerac, qui lui valut un Molière en 2007.

C’est dans l’arène que Lacroix ose le plus ouvertement afficher ses liens avec le peintre. Thème cher aux deux artistes, la tauromachie leur a inspiré des costumes présentés côte à côte. Pour Picasso, celui de Ricardo, torero de ballet dans le Bolero de Ravel en 1941 ; pour Lacroix celui de Javier Condé, héros en 2010 d’une corrida picassienne à Málaga – donnée tous les dimanches de Pâques en l’honneur de Picasso. C’est finalement seul que le couturier referme l’exposition, avec les huit costumes créés pour la mise en scène de Phèdre par Anne Delbée en 1995, son premier Molière. Le « petit plaisir » d’un couturier qui l’affirme : « Si j’étais de la nouvelle génération, à l’heure actuelle je serais certainement conservateur. »

Acte V scènes II et III. Les Picasso d’Arles : invitation à Christian Lacroix

Jusqu’au 30 décembre 2012. Musée Réattu, 10 rue du Grand Prieuré, 13 200 Arles, tél. 04 90 49 37 58, www.museereattu.arles.fr, tous les jours sauf le lundi, jusqu’au 30 juin,10h-12h30 et 14h-18h30, et du 1er juillet au 30 septembre 10h-19h

Acte V

- Commissariat : Michèle Moutashar, directrice du Musée Réattu, et Andy Neyrotti (scène II), Christian Lacroix (scène III)

- Nombre d’œuvres : environ 100

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°372 du 22 juin 2012, avec le titre suivant : Picasso-Lacroix, l’autre rencontre d’Arles

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