Bourg-en Bresse (01)

Mettre les voiles

Monastère royal de Brou - Jusqu’au 29 septembre 2019

Par Dominique Vergnon · L'ŒIL

Le 28 août 2019 - 321 mots

Si l’actualité peut en faire un sujet politique et polémique, le voile est depuis l’Antiquité au cœur de la vie sociale méditerranéenne.

Pour preuve, son étymologie commune à l’arabe et au latin. Le velum est d’abord le rideau qui sous-entend transparence, légèreté, protection. À ces fonctions premières le voile ajoute la séduction, la pudeur, le sacré, le secret, la sujétion. Qu’il soit fichu, hidjab, foulard ou zendale, il témoigne des ambiguïtés que suscite selon les époques et les lieux cette pièce d’étoffe, vue comme symbole ou parure. Présentée au début de la visite, la figurine hellénistique en terre cuite (300 ans av. J.-C.) dont le drapé dissimule le bas du visage, mais dévoile l’attrait du regard, annonce les enjeux des us et coutumes du voile, qui sont développés au fil d’un parcours resserré autour de quatre thèmes bousculant heureusement la chronologie. La diversité des pièces exposées montre comment les cultes et les cultures se sont emparés du voile et ont débordé son simple rôle d’accessoire vestimentaire féminin au point d’en faire pour la vestale, la religieuse, la mariée, l’infirmière, la veuve et la courtisane un marqueur d’identité. Laissé à la liberté de ses jugements, le visiteur est confronté aux significations évidentes ou allusives du voile que les artistes ont su élégamment exploiter ou détourner. Davantage sans doute que les peintures et les sculptures, les nombreuses photos matérialisent les mutations du voile sur la longue durée, et surtout les dualités d’usage qui se sont imposées pour les femmes, par exemple en Iran. Les clichés de Lida Ghodsi sont à cet égard révélateurs de leur privation de liberté. Le choix d’œuvres exécutées par des femmes permet d’élargir une réflexion qui ne reste pas ainsi masculine. En contrepoint, l’écriture inclusive du titre, choisie volontairement, rappelle que le voile n’est pas seulement un attribut féminin. Les hommes en ont été longtemps coiffés, comme le prophète Élisée, les pleurants médiévaux ou le Perse et son turban.

« Voilé.e.s/dévoilé.e.s, le voile dans l’art, Antiquité-XXIe siècle »,
Monastère royal de Brou, 63, boulevard de Brou, Bourg-en-Bresse (01), www.monastere-de-brou.fr

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°726 du 1 septembre 2019, avec le titre suivant : Mettre les voiles

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