Art moderne

XIXE SIÈCLE

Les Trésors cachés des collectionneurs de Marmottan

Par Élisabeth Santacreu · Le Journal des Arts

Le 31 octobre 2018 - 510 mots

PARIS

Le musée fait coup double et expose des œuvres peu montrées tout en mettant à l’honneur les collectionneurs privés qui le soutiennent fidèlement.

Paris. Fondé et enrichi grâce aux donations de trente amateurs d’art, le Musée Marmottan-Monet fait régulièrement appel aux collectionneurs privés pour monter ses expositions. En 2014, pour son 80e anniversaire, il les avait mis à l’honneur avec « Les impressionnistes en privé ». Directeur du musée depuis janvier 2013 et réélu en 2018 pour cinq ans, Patrick de Carolis renouvelle cet hommage à ceux qui, selon ses termes, « font toujours de Marmottan leur maison ».

Les commissaires sont les mêmes qu’il y a quatre ans : Claire Durand-Ruel Snollaerts et Marianne Mathieu ont sélectionné 62 œuvres pour un survol des mouvements impressionniste, néo-impressionniste, nabi, symboliste et fauve. Elles ont de nouveau fait appel à trois des plus grandes collections du monde – celles de Juan Antonio Pérez Simón, d’Isabelle et Scott Black et de David Nahmad – et à un musée privé genevois, fermé depuis des années et généreux prêteur, le Petit Palais. C’est lui qui a envoyé, explique Marianne Mathieu, « une grande icône, Le Pont de l’Europe[voir illustration ci-dessus] (1876) de Gustave Caillebotte, qui fait l’axe de l’exposition, tableau très rarement présenté et dernier grand format de ce peintre en mains privées ».

L’un des buts de la manifestation était de faire revenir à Paris des œuvres qui n’y ont pas été présentées depuis au moins cinquante ans. C’est le cas de 30 huiles, dessins et sculptures, des pépites que la plupart des visiteurs découvriront donc. Parmi elles, le Portrait de femme assise lisant (1888) de Caillebotte sert de préambule au parcours, dégageant l’atmosphère d’intimité que les commissaires veulent suggérer. Pour la plupart, affirment-elles, ces œuvres sont témoins de la vie privée des collectionneurs et, si ceux-ci « sont heureux de partager, ils ont un dialogue quotidien avec l’œuvre et, pour permettre cette exposition, ils s’en privent. Pour certains d’entre eux, nous avons d’ailleurs fait faire des copies. » Un petit Vuillard intimiste orne l’antichambre : Messieurs et Mesdames Josse et Gaston Bernheim-Jeune au 107, avenue Henri-Martin (1905). Dans ce salon tapissé de tableaux, quelques prêteurs ont dû reconnaître leur environnement.

Au long du parcours, précise Marianne Mathieu, « un visiteur à l’œil un peu averti ou curieux verra la dette des derniers artistes envers les premiers. On commence par une vue de Belle-Île de Monet – Les Pyramides de Port-Coton, effet de soleil (1886) – et on termine quasiment par Belle-Île-en-Mer, pochade (1896) de Matisse. » Entre-temps, les correspondances sont nombreuses. Aux Chrysanthèmes rouges (1880) de Monet, qui n’ont pas été montrés au public depuis l’exposition impressionniste de 1882, font écho les tournesols de Gauguin (Nature morte à l’Espérance, 1901) ; La Blanchisseuse (1886-1887) de Toulouse-Lautrec partage le silence rêveur de Figure devant un arbre (vers 1894) de Redon ; la Danseuse rattachant son chausson (vers 1887) de Degas renvoie à la Danseuse espagnole (1901) de Picasso. Car si l’exposition est chronologique, les commissaires se sont autorisé coups de cœur et associations d’idées dans le choix des œuvres, comme l’auraient fait des collectionneurs.

Collections privées, un voyage des impressionnistes aux fauves,
jusqu’au 10 février, Musée Marmottan-Monet, 2, rue Louis-Boilly, 75016 Paris.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°510 du 2 novembre 2018, avec le titre suivant : Les Trésors cachés des collectionneurs de Marmottan

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