Les pyramides désertées

Le tourisme a ralenti depuis 2011. Le crash de l’avion russe semble l’avoir encore plus raréfié. À l’entrée des pyramides, pas de file d’attente malgré la fouille approfondie des voitures.

Plus haut, on se gare pour acheter son billet, puis on redémarre. Depuis quelques années, pour éviter les coups de soleil et l’insistance des vendeurs ambulants (pourtant peu nombreux ce jour-là), on peut circuler entre les pyramides sans quitter son véhicule. À peine une dizaine de voitures se côtoient sur le parking informel entre Khéops et Khephren. Trois cars scolaires venus de la région du Delta ont néanmoins déversé une centaine d’enfants, qui donnent un peu de vie au site. Ils grimpent sur les pyramides pour faire un « selfie », sans qu’un officiel ne bouge. Le panneau « Do not climb » (« ne pas grimper ») est recouvert de poussière, tout comme les canettes et papiers gras sur le sol. On est partagé entre le sentiment de majesté qu’offre le paysage, accentué par l’absence de touristes, et la désolation face au relatif abandon du site. Vendeurs et policiers usent le même leitmotiv : « Oui, la fréquentation a un peu baissé depuis 2011, mais ça va. Aujourd’hui ? C’est calme, mais hier il y avait plus de monde. » Plus loin, un chamelier reformule le discours officiel à sa façon : « Egypt very safe, my friend. We love tourists » (« l’Égypte est sans danger, nous aimons les touristes »).

Au grand musée du Caire, place Tahrir, le sentiment est semblable. « Nous profitons encore d’un grand tourisme asiatique », explique un guide. Un coup d’œil aux rares groupes qui parcourent le musée dément l’optimisme de façade. Dans l’administration, on reconnaît du bout des lèvres que les Russes, premier contingent touristique ces dernières années, ne viennent plus depuis le crash du Sinaï, le 31 octobre dernier. L’autoritarisme du gouvernement ne suffit pas pour rassurer les touristes. Dans la crise économique qu’elle connaît, l’Égypte a pourtant cruellement besoin de cette manne touristique. Sur le plan culturel notamment, où l’heure n’est pas aux investissements, malgré deux importants projets à même de relancer l’activité : si le musée des civilisations d’Égypte est presque terminé, le Grand musée égyptien, voisin des pyramides, est désormais prévu pour 2018.

Légende photo

La pyramide de Khéops © Photo Alex lbh - 2005 - Licence CC BY-SA 3.0 

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°448 du 8 janvier 2016, avec le titre suivant : Les pyramides désertées

Tous les articles dans Expositions

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque