Art contemporain

Dunkerque (59)

La clé Deschamps

Lieu d’art et d’action contemporaine - Jusqu’au 7 mars 2021

Par Fabien Simode · L'ŒIL

Le 27 octobre 2020 - 327 mots

Gérard Deschamps a pris un risque. Celui de faire une œuvre que l’histoire finirait par juger trop légère, à l’instar de ses Pneumostructures, ces jouets de plage gonflables qu’il a lui-même élevé au rang d’œuvres.

Pourtant, ce serait oublier que la démarche de l’artiste, né en 1937 à Lyon, fut dès les années 1950 plus radicale et plus profonde qu’on peut le croire. Ce fut le propos de la monographie que lui consacra Jean-Marc Huitorel aux éditions du Regard en 2017 ; c’est aujourd’hui le sujet de la rétrospective du Laac. « Gérard Deschamps, peinture sans peinture » entend ainsi rendre à l’artiste l’épaisseur qui lui revient : celle de la peinture. Deschamps n’a jamais pris le pinceau ? Toute son œuvre est pourtant traversée par la question de la peinture. Dans les Fleurs de Hollande, accumulation de tissus imprimés de 1963, acquises par le Laac en 2017 et point de départ de l’exposition, il n’est d’ailleurs question que de cela : de châssis, de « toile », de drapé, de couleur et de motif. De fait, des premiers plissages jusqu’à la série des Barrettes militaires, les références sont partout explicites. À la mort annoncée de la peinture, Deschamps répond par une série de panneaux blindés troués d’impacts de balles, où le quadrillage évoque la technique de la mise au carreau. À leur propos, l’exposition du Laac assume même le qualificatif de « peintures d’histoire », rappelant que l’artiste a vécu deux conflits : la Seconde Guerre mondiale et la guerre d’Algérie, durant laquelle il fut mobilisé. Ce n’est pas faux, les bâches textiles utilisées pour la signalisation des troupes alliées, présentées dans la même salle, sont des « peintures d’histoire » au sens propre, dont Deschamps a perçu dès le début des années 1960 le potentiel esthétique, en référence aux travaux des grands abstraits américains, Rothko en tête. Peut-on faire un travail de peintre sans tubes ni pinceaux, grâce aux seuls matériaux de récupération ? La rétrospective Deschamps au Laac répond oui, sans hésitation.

« Gérard Deschamps, peinture sans peinture »,
Laac, 302, avenue des Bordées, Dunkerque (59), www.musees-dunkerque.eu

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Cet article a été publié dans L'ŒIL n°738 du 1 novembre 2020, avec le titre suivant : La clé Deschamps

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