Art contemporain

Rouen (76)

« I’m a Sartrouvillois, baby ! »

Hangar 107

Par Stéphanie Lemoine · L'ŒIL

Le 24 novembre 2020 - 324 mots

Depuis les années 1980, Olivier Kosta-Théfaine arpente le territoire de la banlieue. C’est un territoire intime : l’artiste a passé son adolescence à Sartrouville.

C’est aussi un territoire médiatique et une zone fertile dans l’imaginaire contemporain, quoique lestée de clichés tenaces. Ce territoire, l’artiste l’a d’abord arpenté en graffeur, puis en zélateur de la scène post-graffiti. L’exposition que lui consacre le Hangar 107 n’est d’ailleurs pas tout à fait étrangère à ce début de parcours, puisque le centre d’art rouennais s’attache depuis 2018 à sonder ce qui circule de l’art urbain à l’art contemporain, et inversement. En une petite dizaine d’œuvres et de créations in situ, Olivier Kosta-Théfaine y décline au gré des paysages une même inversion des valeurs et des imaginaires. De bout en bout, « cette sorte de sourire que sont parfois aussi les fleurs au milieu des herbes graves » cultive le faux-semblant. Dans l’abbatiale de Rouen, un tapis de verre brisé compose « un jardin à la française ». Le plafond noir et blanc qui orne le hall d’entrée du Hangar 107 a été créé au moyen d’un briquet, suivant une pratique ordinaire dans les HLM sartrouvillois. À ce produit du désœuvrement Olivier Kosta-Théfaine superpose ainsi d’autres lignées, autrement prestigieuses. Plus loin, des blocs de béton issus de la démolition de la cité des Indes évoquent une collection de gemmes, exotique et précieuse. Dans l’espace d’exposition, des paysages semblables à des photographies sépia se révèlent en papier brûlé ; à l’inverse, les motifs ornant les strapontins du RER sont des tapis de fleurs. Quant aux cartes postales de Sartrouville, elles dissolvent tout pittoresque dans une succession de lieux banals, sans qualités. Ces retournements caractérisent la banlieue comme un entre-deux : entre ville et campagne, entre verdure et béton, entre violence urbaine et douceur bucolique. Mais, en filigrane, l’ambivalence du territoire fait écho aux oscillations d’Olivier Kosta-Théfaine, artiste lui-même tendu entre deux : entre culture savante et populaire, entre héritage du graffiti et art contemporain.

« Olivier Kosta-Théfaine »,
Hangar 107, 107, allée François-Mitterrand, Rouen (76), www.hangar107.fr

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Cet article a été publié dans L'ŒIL n°739 du 1 décembre 2020, avec le titre suivant : « I’m a SARTROUVILLOIS, baby ! »

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