Expériences sensuelles

Un abus de langage qui ferait oublier que l’art immersif a, lui, bel et bien existé. C’est aux pionniers de ces expérimentations que l’exposition de Lausanne est consacrée, et le résultat est spectaculaire. Ce tour de force technique a permis au musée de reconstituer, parfois à l’aide d’indications et de documents d’archive minimaux, quatorze installations qui ont vu le jour entre 1949 et 1969. Vingt ans séparent l’année de création d’Ambiente spatiale a luce nera (Environnement spatial avec lumière noire, 1949) par l’artiste ­italo-argentin Lucio Fontana, la première en son genre, et les premiers pas de l’homme sur la lune (1969). À la conquête de l’espace font écho ici de nombreuses tentatives d’expérimenter l’espace par les sens : l’Américaine Judy Chicago dans la douceur d’un bain de plumes, l’Italienne Laura Grisi reproduisant la sensation d’un vent fort (74 km/h), Bruce Naumann qui fait parler les murs, James Turell modifiant la perception de l’espace par la lumière ou encore Robert Morris imaginant avec Passageway (créé pour Yoko Ono en 1961) un passage oppressant sans issue. Les espaces du musée lausannois sont, quant à eux, transfigurés par cette exposition très innovante : on passe d’une pièce à l’autre, les chaussures à la main, et on plonge dans des ambiances radicalement différentes, lumineuses, colorées, angoissantes, kitsch, enveloppantes ou archaïques. Succès garanti pour tous les publics, y compris les enfants !