Échappée poétique en Arcadie

Par Emilie Oursel · L'ŒIL

Le 6 août 2007 - 306 mots

Les néo-impressionnistes italiens, qualifiés de plagiaires par les peintres français, sont restés dans l’ombre de l’avant-garde. C’est un hommage justifié que leur rend aujourd’hui le Deutsche Guggenheim Museum, à Berlin, à travers un face-à-face éblouissant de quarante œuvres françaises et italiennes des années 1880 et 1890.
Les côtes bretonnes de Paul Signac et les paysages ruraux de Camille Pissarro dialoguent avec des scènes champêtres dans les montagnes alpines, que dépeignent Giovanni Segantini ou Angelo Morbelli. Établis à Milan, ils privilégient les scènes bucoliques, comme dans Spring Pastures, de Segantini, où un troupeau mené par des paysans s’ébat dans les hauts pâturages.
Séduits par la luminosité et le dynamisme des compositions françaises, les peintres italiens utilisent la technique particulière du divisionnisme – inventée par Georges Seurat –, qui consiste en la juxtaposition de touches de couleurs primaires.
Si les toiles italiennes rayonnent autant que les toiles françaises, elles révèlent bientôt d’autres visées que le simple plaisir sensuel. Dans les tableaux de Giovanni Segantini, les paysannes s’élancent telles des nymphes botticelliennes et trahissent le dialogue romantique du peintre avec la nature. Sous leur pinceau, l’Italie de la fin du xixe siècle, alors en pleine révolution industrielle, retrouve les paysages de l’Arcadie, cette contrée idyllique et sauvage décrite par Homère.
De plus en plus symbolistes, les peintures italiennes ne vont faire des émules qu’en dehors de leurs frontières. Giovanni Segantini, de passage en Allemagne, est désigné comme l’un des précurseurs du mouvement du « spirituel dans l’art » par Kandinsky lui-même.
L’exposition est une occasion exceptionnelle de découvrir cet élan de révolte poétique, qui annonce les accords ultérieurs de la peinture futuriste. Les tableaux proviennent de grandes collections, telle celle du le Museum of Modern Art, à New York.

« Divisionism, neo-impressionism : Arcadia and Anarchy », Deutsche Guggenheim Museum, Berlin (Allemagne), www.deutsche-guggenheim.de, du 27 janvier au 15 avril 2007.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°588 du 1 février 2007, avec le titre suivant : Échappée poétique en Arcadie

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