Afghanistan

Le passé restauré

Par Bérénice Geoffroy-Schneiter · L'ŒIL

Le 6 août 2007 - 386 mots

À travers la présentation de quatre trésors archéologiques d’une exceptionnelle beauté, l’exposition du musée Guimet rend un hommage émouvant à un patrimoine malmené par les guerres.

C’est une petite pendeloque en or constellée de turquoise qui résume peut-être le mieux le caractère exceptionnel de l’exposition du musée Guimet. Découverte au nord de l’Afghanistan, sur le site de Tillia Tepe (la bien-nommée « colline d’or »), cette parure sophistiquée reflète avec éclat le formidable creuset de peuples, de religions et de langages que constituait cette région à l’aube de notre ère. N’y reconnaît-on pas un « maître des animaux » vêtu à l’orientale terrassant, de chaque main, les corps sinueux de deux dragons ?
Terre de rencontres entre tribus nomades et puissances sédentaires, monde interlope aux confins de la Grèce, de la Chine et de l’Inde, l’Afghanistan était bien cette plaque tournante par laquelle transitaient les œuvres d’art en même temps que les idées et les hommes…

220 pièces préservées de la furie du régime taliban
On comprend dès lors la stupeur qui s’empara du monde entier, un certain 11 mars 2001, lorsque les talibans décidèrent de réduire en poussière ces témoignages de piété et de ferveur que représentaient, sur l’antique route des steppes, les deux bouddhas de Bamiyan. Un geste de provocation et d’obscurantisme qui allait recouvrir d’un linceul noir et opaque la population afghane et une grande partie de son patrimoine…
On ne compte plus, en effet, les conséquences désastreuses de l’occupation soviétique, puis de l’instauration du régime taliban sur les sites archéologiques comme sur les collections du musée de Kaboul. Bombardements, pillages, destructions massives furent le lot subi par bien des œuvres d’art, dont on ne conserve parfois la trace que par des photographies d’archives noir et blanc.
C’est dire le véritable « miracle » que constitue l’exposition du musée Guimet. À travers la présentation exceptionnelle de quelque deux cent vingt pièces « rescapées », le visiteur parisien découvre la richesse du patrimoine afghan, depuis l’âge du bronze (environ 2 200-1 800 av. J.-C.) jusqu’à l’avènement de l’empire des Kouchans, aux environs de notre ère.
Pendentifs, plaques de ceinture, miroirs chinois, intailles gréco-romaines, verreries peintes, bronzes hellénistiques, ivoires indiens reflètent la richesse de cette Eurasie sophistiquée et sensuelle, largement ouverte sur le monde. Loin, bien loin des obscurantismes de tout bord et de toute confession…

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°588 du 1 février 2007, avec le titre suivant : Afghanistan

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