Tuiles mécaniques

Par Christian Simenc · L'ŒIL

Le 29 août 2018 - 402 mots

Londres -  Planté en plein cœur de Kensington Gardens, pile-poil devant la Serpentine Gallery, on ne peut le manquer.

Le pavillon de la Serpentine Gallery 2018, réalisé par Frida Escobedo.
Le pavillon de la Serpentine Gallery 2018, réalisé par Frida Escobedo.
Photo Iwan Baan
© Frida Escobedo, Taller de Arquitectura

Le Pavillon d’été 2018 du fameux centre d’art londonien est signé par la Mexicaine Frida Escobedo, 39 ans. Sa particularité : arborer deux visages. Selon l’angle dans lequel on se trouve, ses murs passent, en effet, d’un aspect complètement transparent à quasi opaque. Ceux-ci sont, en réalité, constitués d’un module très simple : une tuile en ciment de couleur gris foncé, utilisée habituellement au Royaume-Uni. « Nous voulions, d’abord, travailler avec des matériaux simples et surtout locaux, et, ensuite, ne pas faire de formes ultra-sophistiquées, explique Frida Escobedo. À partir de ce module de construction, superposé de manière élémentaire, nous avons imaginé un motif pour générer les parois, une sorte de “mur-écran” qui filtre la vue. » Ce système s’inspire aussi de la technique de la Celosia, manière d’ajourer les murs habituellement utilisée au Mexique pour faire pénétrer l’air et la lumière à l’intérieur d’une maison. « Le Pavillon flirte avec cette double notion intérieur/extérieur. On y est à la fois dedans et dehors. C’est un espace complètement sûr : on peut voir au travers, sans être vu », explique l’architecte. L’effet est bluffant, et réussi. Surface de l’édifice : 233 m2. Hauteur : 3,24 m.En plan, le Pavillon semble résulter d’un geste simple : l’emboîtement de deux volumes rectangulaires placés dans un angle. L’un est parallèle à la façade de la Serpentine Gallery, plein est, tandis que l’autre est orienté au nord. « La simple rotation crée une cour intérieure, caractéristique très répandue dans l’architecture domestique mexicaine, souligne Frida Escobedo. Elle permet, en outre, de produire une série d’espaces irréguliers ». À l’intérieur du Pavillon, dans l’espace principal, une vaste cour intérieure donc, deux éléments réfléchissants accentuent, la journée durant, le mouvement de l’ombre et de la lumière : d’une part, au sol, un bassin empli d’eau arbore un fond réverbérant ; de l’autre, le plafond en forme d’aile d’avion est habillé de panneaux-miroirs. « Le mouvement du soleil à travers le ciel, reflété et réfracté par le bassin et le plafond, encourage la conscience du temps qui passe dans l’expérience partagée et dans la contemplation », promet l’architecte. « Le Pavillon d’été est un sacré exercice, admet-elle, car il s’agit de concentrer en un micro-espace ses idées sur l’architecture et d’y mettre en scène l’esprit et l’ethos de son agence, le tout avec un budget restreint. » Bref, un monde en soi.

À savoir
Frida Escobedo a établi son agence, en 2006, à Mexico DF. Quatre ans plus tard, elle se fait connaître à travers une installation déployée dans la cour centrale du Museo Experimental El Eco, à Mexico DF, conçue avec une myriade de parpaings de ciment. En 2012, à Cuernavaca, elle a réhabilité « La Tallera » , maison-atelier d’un des peintres phares mexicains : David Alfaro Siqueiros
À voir
Le Pavillon d’été de la Serpentine Gallery est visible jusqu’au 7 octobre.Kensington Gardens, Londres, www.serpentinegalleries.org

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°715 du 1 septembre 2018, avec le titre suivant : Tuiles mécaniques

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