Art contemporain

Pierre Charpin

Service volé

Par Christian Simenc · Le Journal des Arts

Le 25 juillet 2007 - 606 mots

Aura-t-on la surprise de voir, la semaine prochaine, au tournoi de tennis de Wimbledon, une chaise d’arbitre griffée Tectona ? Rien n’est moins sûr même si celle-ci permet « les descentes et les remontées rapides en cas de litiges », comme l’indique sa fiche technique. Mais peut-être les Anglais auront-ils davantage d’audace que les Français qui, eux, ont (lamentablement) raté le coche lors du récent tournoi de Roland-Garros 2007. Certes, le public du court central de la Porte d’Auteuil a pu voir en finale et pour la deuxième année consécutive le Suisse Federer se faire laminer par le rouleau compresseur espagnol Nadal. En revanche, il n’a point pu admirer la collection « Tennis », ce mobilier pour court de tennis édité par la firme française Tectona. Ces meubles, au nombre de trois – une chaise d’arbitre, un banc à deux places et une chaise de juge de ligne –, avaient été dessinés pour l’occasion par le designer Pierre Charpin. Et ce dernier a réalisé un véritable exploit : celui de moderniser les lignes de ce mobilier vieillissant tout en se pliant aux normes très strictes de la compétition. « Le dessin de la chaise d’arbitre et du banc des joueurs apporte des réponses formelles et constructives simples aux contraintes et aux spécificités fonctionnelles du mobilier du court de tennis », souligne Tectona. Pour l’heure, seuls la chaise d’arbitre et le banc des joueurs sont entrés en production. La chaise de juge de ligne, elle, est restée dans les cartons. Aux lattes en teck – matériau fétiche de Tectona –, Pierre Charpin a marié un élégant tube en aluminium thermolaqué, dont il a fait toute la structure – cadre et piètement – des deux assises. Grâce à son revêtement de laque extrêmement résistant à l’abrasion, l’aluminium ne rouille pas. En outre, il allie robustesse et légèreté. Résultat : le banc des joueurs ne pèse que 20 kg, la chaise d’arbitre 50 kg.

Chaise d’arbitre escabeau
Si ce mobilier n’a pas trouvé preneur du côté de la Fédération française de tennis, il semble provoquer l’engouement des particuliers. Sortie il y a quelques semaines à peine, la chaise d’arbitre a, paraît-il, déjà un succès fou et pas uniquement sur les courts de tennis. « La chaise d’arbitre a été détournée de manière très amusante, explique Arnaud Brunel, président de Tectona. Chez certains de nos clients, elle fait en effet office d’escabeau de bibliothèque ». « Mais cela ne m’étonne pas trop, ajoute-t-il, la forme de cette chaise d’arbitre n’est finalement pas si éloignée de celle des escabeaux fin XIXe de la Bibliothèque nationale ».
Tectona, qui fête cette année ses 30 ans d’activité, ne faisait appel que ponctuellement à des designers extérieurs, et ce depuis 1992. Les amateurs d’art contemporain se souviendront d’ailleurs des fameux bancs dessinés cette année-là par la décoratrice Andrée Putman pour le capcMusée d’art contemporain de Bordeaux, ces bancs à l’assise large et confortable et au dossier qui n’en finit pas… À la tête de la société depuis 2000, Arnaud Brunel, lui, compte désormais accélérer le mouvement. Ainsi, a-t-il confié au duo Ronan et Erwan Bouroullec la réalisation d’un mobilier d’extérieur : « un travail spécifique autour d’un thème, l’assise, et d’un matériau, une résine synthétique tressée ». Les premiers prototypes pourraient voir le jour d’ici à l’an prochain. Autres designers dans la « short-list » d’Arnaud Brunel : l’Allemand Konstantin Grcic (« Les premiers contacts ont déjà été pris », affirme le président), voire l’Anglais Jasper Morrison (« Tout est à faire »). Quinze ans après Andrée Putman, un vent frais souffle à nouveau chez Tectona.

Dimensions de la chaise d’arbitre : hauteur : 235 cm ; hauteur assise : 198 cm ; largeur : 87 cm ; profondeur : 142 cm. Prix : 1 500 euros.
Dimensions du banc des joueurs : hauteur : 91 cm ; hauteur assise : 45 cm ; largeur : 130 cm ; profondeur : 68 cm. Prix : 690 euros.
Renseignements : www.tectona.net.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°262 du 22 juin 2007, avec le titre suivant : Service volé

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