Rome

Points lumineux

Par Frédéric Bonnet · Le Journal des Arts

Le 2 août 2007 - 468 mots

Plusieurs sites de la ville se parent d’interventions contemporaines.

 ROME - Le palais Farnèse est rouvert aux Romains ! Tous les soirs, pour une durée certes limitée, l’un des plus beaux palais renaissants de la capitale italienne, occupé depuis 1875 par l’ambassade de France, accueille en son sein une manifestation artistique ouverte au public et regroupant onze artistes. En outre, l’impact et l’emprise de l’opération dans la ville se trouvent renforcés par des installations dans trois autres lieux marqués par la présence française. Ainsi Jean-Baptiste Ganne officie-t-il à la Villa Médicis, siège de l’Académie de France à Rome, tandis que Sarkis et Giovanni Anselmo ont respectivement occupé les églises Saint-Louis-des-Français et Saint-Nicolas-des-Lorrains.
Confié par l’ambassadeur de France, Yves Aubin de La Messuzière, aux bons soins de Henry-Claude Cousseau, le projet « Luce di pietra » a été pensé comme un dialogue franco-italien entre la création la plus contemporaine et un patrimoine bâti où, particulièrement à Rome, se superposent des strates temporelles souvent visibles à l’œil nu. Un dialogue envisagé à l’aune de la lumière dans une ville où sa qualité particulière a alimenté la formation et l’inspiration de nombre de générations d’artistes. Et où la recherche d’ombre concomitante a toujours créé « une antinomie productrice d’imaginaire », pour reprendre les mots du commissaire.
Il est frappant de constater que c’est un rapport plus ou moins affirmé à la peur ou à la menace qui a intéressé plusieurs artistes. Ainsi Christian Boltanski a-t-il installé en façade une petite ronde macabre en ombres chinoises, derrière une fenêtre du premier étage (Les Ombres, 1986-2007), tandis que Yann Toma, avec Inondation (2007), a anticipé « l’inondation du monde » en déversant 100 000 ampoules électriques dans les sous-sols. Faiblement éclairée et agrémentée de cliquetis mécaniques, l’installation se révèle efficace tant dans son potentiel suggestif que par sa poésie visuelle. Dans la cour, les oiseaux morts transpercés de flèches de Jannis Kounellis, alternativement éclairés par un projecteur déplacé manuellement, font flop (Sans titre, 2007). Ce mode opératoire, pas assez énergique, contredit la dramatisation voulue.
D’autres artistes ont choisi de faire voyager les visiteurs dans des mises en situation parfois paradoxales. Quand Laurent Grasso inscrit, en néon rouge dans un bloc de Plexiglas fumé, un slogan contradictoire (Du soleil dans la nuit, 2007), Claude Lévêque investit « brillamment » la galerie des Carrache en neutralisant la richesse des couleurs de la voûte à l’aide de la lumière noire (Le Rôdeur, 2007). Mais c’est Patrick Tuttofuoco qui, avec son installation Y (2004), entraîne le spectateur le plus loin, grâce à des reflets de miroirs. Ses pulsations de néons roses et verts en cascade ouvrent des voies infinies qui paraissent impossibles à appréhender complètement.

Luce di pietra

Jusqu’au 15 avril, Palazzo Farnese, Piazza Farnese, 67, Rome, tél. 39 06 45438807, www.lucedipietra.it, tlj 19h30-23h30 (sur réservation). Catalogue à paraître.

Luce di pietra

- Commissaire : Henry-Claude Cousseau, directeur de l’École nationale supérieure des beaux-arts, Paris - Nombre d’artistes : 14 - Nombre de sites : 4

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°257 du 13 avril 2007, avec le titre suivant : Points lumineux

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