Mode

Issey Miyake, leçon de style

Par Anne-Cécile Sanchez · L'ŒIL

Le 23 avril 2025 - 368 mots

L’art et la mode font bon ménage en ce moment. La dernière collection de prêt-à-porter de la marque japonaise s’inspire ainsi fortement des superpositions de vêtements faites œuvres de l’artiste Erwin Wurm.

S’il n’est pas rare de voir un artiste signer la scénographie d’un défilé de mode (Xavier Veilhan pour Chanel en 2022, Olafur Eliasson pour Prada en 2017, Daniel Arsham pour Dior en 2019…), il est moins fréquent que leurs démarches artistiques inspirent, de leur vivant, des collections de prêt-à-porter. En 2021, on a pu voir la directrice artistique de Dior, Maria Grazia Chiuri, citer Niki de Saint Phalle, Prada faire référence à Andy Warhol en 2019, comme Vuitton à Jean-Michel Basquiat, et avant eux, Yves Saint Laurent reprendre en 1965 la grille moderniste de Piet Mondrian. Le 7 mars dernier, au Carrousel du Louvre, la griffe japonaise Issey Miyake est allée plus loin, lors de son défilé Automne-Hiver 2025-2026. Non seulement elle a convoqué l’œuvre contemporain d’Erwin Wurm (né en 1954) par la présence d’une de ses « One Minute Sculptures » mais, entre juxtapositions, contorsions et silhouettes surdimensionnées, c’est le vestiaire lui-même de la marque qui a fait écho à l’univers de l’artiste autrichien. Il faut dire que les vêtements sont, depuis ses débuts, omniprésents dans le travail d’Erwin Wurm, qui vivait au-dessus d’une friperie. Il les utilise pour mettre en scène la versatilité de cette seconde peau (étirée, superposée, retournée) dont il souligne non sans humour le potentiel sculptural. En 1992, avec le projet « Fabio Gets Dressed », Wurm invite un complice à enfiler tous les habits de sa garde-robe les uns sur les autres, le transformant ainsi en un mannequin obèse. La vidéo 59 Positions montre aussi l’artiste et ses amis aux prises avec des pulls, des pantalons et des chemises, leur étrange chorégraphie donnant lieu à des formes incongrues, captées par l’objectif. Entreprise au milieu des années 1990, la série des « One Minute Sculptures », immortalise quant à elle les postures statufiées de corps entravés par des vêtements. Satoshi Kondo, qui conçoit les collections depuis la disparition d’Issey Miyake en 2022, a puisé dans cet art de l’absurde une leçon de style que l’on rêverait de retrouver bientôt dans la rue. Une autre conception de l’élégance.

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Cet article a été publié dans L'ŒIL n°785 du 1 mai 2025, avec le titre suivant : Issey Miyake, leçon de style

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