Monographie

Hamish Fulton, un peintre marcheur

À Sète, Hamish Fulton dévoile une série de peintures inspirées par ses marches dans les Pyrénes ou en Asie

Par Frédéric Bonnet · Le Journal des Arts

Le 14 janvier 2014 - 462 mots

La carte accueille le visiteur, façon cours d’histoire-géo. Les tracés de trente-deux parcours effectués à pied entre 1971 et 2012 en Europe y sont indiqués ; ils ont tous pour origine et destination un point d’eau, puisqu’ils se sont déroulés « de côte à côte, de côte à rivière, de rivière à côte ou de rivière à rivière », y est-il mentionné avec un sens aigu de la précision (32 Walks Map, 1971-2012).

SÈTE -  Les amateurs de ses photo-textes seront peut-être surpris, car ses fameuses images noir et blanc indiquant la durée et la localisation géographique du parcours durant lequel a été exécutée la prise de vue sont très peu présentes dans cette exposition. Mais l’infatigable marcheur qu’est Hamish Fulton y réserve d’autres surprises, des peintures murales en l’occurrence, seize au total.

Celui qui depuis plus de quarante ans arpente la planète afin de tirer de la marche la matière de son art n’est pas pour autant devenu un peintre naturaliste, quoique finalement s’installe lors de la visite une certaine forme de paysagisme. Qui l’eût cru chez celui qui est considéré comme un tenant d’un conceptualisme rigoureux, même si ne prime pas ici l’idée mais l’expérience du réel : « une ligne marchée, contrairement à une ligne dessinée, ne peut pas être effacée », assène encore la carte introductive.

Rapport au tableau
Avec cet ensemble d’œuvres méconnues en France, les commissaires Noëlle Tissier et Muriel Enjalran apportent au Centre régional d’art contemporain Languedoc-Roussillon, à Sète, un éclairage particulier au travail de l’artiste britannique. S’y révèle en effet une variété insoupçonnée des modes d’expression picturale, lesquels, quoique toujours relativement sages, avec des textes parfaitement calibrés, un travail savant des couleurs, des encadrements précis – à la manière d’un tableau ! – et des tracés ou motifs au trait rigoureux, n’en offrent pas moins une incessante inventivité formelle.

Alors qu’un déplacement de 23 jours dans les Pyrénées se traduit par des silhouettes de montagnes géométriques (Moutain Skyline, 2012), des souvenirs d’Asie, territoire de prédilection de l’artiste – notamment le Japon, le Népal et le Tibet –, président au déploiement d’un magnifique idéogramme sur fond rouge (The Way, 1996) ou de lettrages insérés dans des schémas complexes (Google Champa Tenzin, 2007).

À cheval entre les cultures occidentale et orientale, bâti sur un rapport aiguisé des couleurs et des lignes de force, l’œuvre peint de Fulton interroge avec autant d’élégance que d’acuité le concept de paysage dans une ère globalisée où peu de territoires demeurent inexplorés et sont soumis à des mutations, tant écologiques que visuelles. Ceci sans négliger l’exercice d’une imagination poétique.

HAMISH FULTON. EN MARCHANT

Jusqu’au 2 février, Centre régional d’art contemporain Languedoc-Roussillon, 26, quai Aspirant-Herber, 34200 Sète, tél. 04 67 74 94 37, crac.languedocroussillon.fr, tlj sauf mardi 12h30-19h, samedi-dimanche 14h-19h. Livret d’accompagnement, 32 p.

Légende photo

Vue de l'exposition d'Hamish Fulton, « En Marchant », au CRAC, Sète. © Photo : Richard Sprang

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°405 du 17 janvier 2014, avec le titre suivant : Hamish Fulton, un peintre marcheur

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