Le mac/val

De la collection au musée

Par Gilles de Bure · Le Journal des Arts

Le 7 octobre 2005 - 725 mots

Depuis Paris, sans voiture, c’est une quasi-expédition. Le choix est simple : soit la ligne 7 du métro avec sortie porte d’Italie, soit la ligne C du RER avec descente à Vitry-sur-Seine (Val-de-Marne). Puis, quelle que soit l’option choisie, il s’agit d’enchaîner. Dans le premier cas, continuer avec le bus 183 et rallier l’arrêt Moulin-de-Saquet-Pelletan ; dans le second, c’est le 180 qui relaie et conduit au même arrêt...
Pourtant, tous les communiqués annoncent le MAC/VAL (Musée d’art contemporain du Val-de-Marne)
« à l’immédiate proximité de Paris » !
Il est vrai qu’aujourd’hui la civilisation des loisirs a créé un « gap » psychologique pour ce qui concerne les déplacements : on s’envole plus facilement vers Pékin, Los Angeles ou Le Cap qu’on ne franchit le périphérique pour s’enfoncer au plus profond de la banlieue.
Quoi qu’il en soit, le jeu, ici, en vaut largement la chandelle. Premier signal, un monumental Dubuffet trône au cœur du carrefour de la RN 305 : il s’agit de la Chaufferie sans cheminée, commande publique datant de 1996 et qui, neuf ans durant, a été, en ce lieu, battue par les vents comme un totem isolé.
Mais voici que, depuis cet été, cette dernière a été rejointe par un vaste bâtiment tout de « planitude » et d’horizontalité, le MAC/VAL, dont l’ouverture au public est fixée au 18 novembre 2005.
« Un musée en noir et blanc puisqu’y dominent le béton blanc et la pierre de basalte », confie l’architecte Jacques Ripault, dont on connaît, justement, le goût et la maîtrise qu’il a du béton blanc d’un seul tenant. Un vaste bâtiment à l’inverse des « gestes » dont le Guggenheim de Frank O. Gehry à Bilbao constitue l’acmé. Un lieu apparemment modeste, tout entier dévolu à sa fonction, la présentation des œuvres, mais ambitieux pour ce qui concerne les espaces, les hauteurs et, surtout, la lumière, traitée ici de façon magistrale ; et où se multiplient les cadrages, les perspectives, les découvertes, les rebondissements et les enchaînements.
Au total, 13 000 m2 qui accueillent les salles d’exposition permanente de la collection (2 600 m2), les
salles d’expositions temporaires (1 350 m2), les réserves et ateliers de maintenance (1 700 m2), un centre de documentation (380 m2), une salle de cinéma de 150 places, une librairie (gérée par Bookstorming), un restaurant et deux ateliers-logements pour artistes en résidence (120 m2 chacun).
On pourrait être surpris de la naissance d’un tel musée en un contexte urbain aussi diffus. Pour vaincre l’étonnement, il faut remonter à 1982, où, à l’initiative de Jack Lang, s’opère un transfert de compétences de l’État aux collectivités publiques. Sous l’impulsion de Michel Germa, alors président du conseil général du Val-de-Marne, et sous la direction artistique de Raoul-Jean Moulin, critique d’art, se constitue dès lors une étonnante et riche collection qui va traverser plusieurs décennies d’art « en France ». Avec, notamment représentés, l’école de Paris (Bryen, Manessier…), la peinture gestuelle (Degottex, Hartung, Reigl, Soulages…), l’abstraction géométrique (Jacobsen, Magnelli…), le lumino-cinétique (Le Parc, Morellet, Soto, Tinguely…), Supports-Surfaces (Buraglio, Dezeuze, Jaccard, Viallat…), le Nouveau Réalisme (Arman, César, Raysse, Spoerri…), la Figuration narrative (Adami, Erro, Monory, Rancillac, Télémaque…), mais aussi Arnal et Kowalski, Pommereulle et Jean-Pierre Raynaud… La décision de la création du musée date de 1990, le choix de l’architecte, de 1992 et le début des travaux – financés à hauteur de 30,5 millions d’euros HT pour moitié par le conseil général du Val-de-Marne et pour moitié par le ministère de la Culture et le conseil général d’Île-de-France –, de 2003. Nommée conservateur du musée en 1998, Alexia Fabre a continué avec enthousiasme et justesse une politique d’achats active. Raymond Hains et Jean-Pierre Bertrand, Boltanski et Buren, Annette Messager et Carole Benzaken, Claude Rutault et Valérie Jouve, Ange Leccia et Anri Sala, Gilles Barbier et Alain Bublex, Malachi Farrell et Barthélémy Toguo, entre autres, sont venus enrichir la collection.
Une collection exemplaire, trans-genres et trans-générations, largement présentée dès l’inauguration du musée, accompagnée d’une exposition temporaire, qui s’annonce magistrale, en rose de Jacques
Monory intitulée « Détour » (18 novembre 2005-19 février 2006), et à laquelle succédera une autre consacrée à Claude Lévêque. Enfin, à son ouverture, et à l’initiative d’Alexia Fabre, le bâtiment de Jacques Ripault s’enrichira de deux interventions signées Felice Varini et Michel Verjux.

Mac/Val

Carrefour de la Libération, 94400 Vitry- sur-Seine, tél. 01 43 91 64 20.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°222 du 7 octobre 2005, avec le titre suivant : De la collection au musée

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