Installations

Aménagements concertés

Par Olivier Michelon · Le Journal des Arts

Le 16 avril 2004 - 437 mots

 PARIS - Sous l’intitulé de « Non-lieu », l’exposition du Plateau, centre d’art parisien, réunit trois artistes et autant d’« espèces d’espaces ». Le premier, celui de la Suissesse Miriam Cahn, est peut-être le moins immédiat. Il se construit sur la surface du tableau et se répercute dans l’espace, par un accrochage constitué de combinaisons réalisées à partir d’un répertoire d’œuvres. Motifs frontaux, ses paysages ou portraits sont rendus dans des teintes acides et avec un expressionnisme diaphane. Ils se conjuguent dans des voisinages anxieux, nichant le visiteur au centre. Les deux autres artistes invités pratiquent des interventions plus littérales – au sens positif du terme. Ils embrassent directement l’espace en l’empêchant de tourner en rond. Ainsi des « Encombrants » réalisés il y a quelques années par Romain Pellas dans les rues de Paris, élévations précaires dans l’espace public et qui trouvent ici une suite dans une tout autre configuration, celle d’un lieu fermé et protégé. Conduites par un plan directeur qui multiplie les ramifications, les structures de Pellas s’élèvent de manière empirique à partir de fragments de contreplaqués. L’œuvre, qui s’intitule Panoramique, prend en porte-à-faux son titre, tant sa construction par circuits et courts-circuits interdit tout point de vue unique, même si le tout est englobé par un revêtement de plastique qui court du sol jusqu’en haut des murs. Si le « non-lieu » tel qu’il a été défini par Marc Augé dans Non-lieux (1) désigne un espace générique de transit et de flux, les œuvres de Pellas élèvent, par le biais de l’agglomération de rebuts, une condensation visuelle et matérielle de ces flux, comme figés dans un éclairage artificiel à base de néons. La même logique d’un enregistrement des circulations se poursuit dans les séries de dessins exposés par l’artiste quelques mètres plus loin. Entre les deux, Laurent Pariente, Français désormais installé aux États-Unis, a dressé une surface murale de 460 m2. Soit plus de 150 mètres linéaires d’une cimaise poudreuse, recouverte de craie blanche qui plie l’espace d’exposition. L’idée d’un volume est partiellement oblitérée au profit de la construction d’un labyrinthe de passages. Une sculpture praticable, qui, si elle ménage une pièce en son centre, oblige à frôler le mur dans le sens de la marche.

(1) Introduction à une anthropologie de la surmodernité, éditions du Seuil, 1992.

NON-LIEU. MIRIAM CAHN, LAURENT PARIENTE, ROMAIN PELLAS

Jusqu’au 23 mai, Le Plateau/Fonds régional d’art contemporain d’Île-de-France, angle de la rue des Alouettes et de la rue Carducci, 75019 Paris, tél. 01 53 19 88 10, tlj sauf lundi et mardi, 14h-19h, samedi et dimanche 11h-19h, www.fracidf-leplateau.com. Catalogue, coéd. Le Plateau/FRAC Île-de-France, 52 p., 17 euros, ISBN 2-87317-239-8.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°191 du 16 avril 2004, avec le titre suivant : Aménagements concertés

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