MoMA

Alerte environnement

Le MoMA PS1 s’interroge sur les enjeux écologiques combinant exposition et débats.

Par Frédéric Bonnet · Le Journal des Arts

Le 19 juin 2013 - 736 mots

Dans la chaleur du printemps new-yorkais, soudain un froid glacial. Entrer dans cette salle du MoMA PS1, à New York, équivaut pour le spectateur à s’approcher du pôle Nord et en effet, on n’en est pas loin.

NEW YORK - Dans la chaleur du printemps new-yorkais, soudain un froid glacial. Entrer dans cette salle du MoMA PS1, à New York, équivaut pour le spectateur à s’approcher du pôle Nord et en effet, on n’en est pas loin. De larges morceaux de glace sont entreposés là, des fragments du plus gros glacier islandais, le Vatnajökull, qui à la faveur du réchauffement climatique se sont désolidarisés de leur base, rompant avec une histoire vieille de 800 ans environ. Olafur Eliasson les a récupérés et transposés en sculptures qui, au-delà d’un témoignage sur l’alerte écologique, convoquent un curieux décalage temporel. L’alerte et le décalage, c’est un peu tout ce qui fait le projet de « Expo 1 : New York » ; un curieux titre peu engageant, pour un projet qui l’est beaucoup plus par sa nature, sa problématique et ses enjeux. Car plus qu’une simple exposition, la manifestation se pose comme un bouillon d’idées, un regroupement d’expériences et de réflexions adoptant des formats divers, centrés sur les défis écologiques posés par des bouleversements politiques, économiques et climatiques intrinsèquement liés.

Une invitation à débattre
Le champ d’exploration est vaste puisque Volkswagen, partenaire du MoMA et de la manifestation, a installé un dôme géodésique temporaire faisant office de centre civique et communautaire à Rockaway Beach, loin dans le quartier du Queens, sur l’une des zones les plus durement touchées par le passage de la tempête Sandy à l’automne dernier et dont d’impressionnants stigmates sont encore visibles, avec notamment des immeubles toujours inhabitables. Nommé le VW Dome 2, le lieu tient à la fois d’espace de rencontres et de débats, de projections de films et de documentation sur les artistes engagés dans les différentes étapes de « Expo 1 ». De même qu’y sont exposés les résultats d’un appel à projets lancé par le département Architecture et Design du MoMA, qui a sollicité architectes et designers en vue de faire des propositions de constructions durables en front de mer.
Retour au MoMA PS1 avec des formes plus conventionnelles d’expositions. Encore que la volonté manifeste d’aller au-delà et d’engager une expérience sociale se traduise notamment par l’installation d’une école animée par la revue Triple Canopy, qui a demandé à José Léon Cerrillo de développer un lieu d’accueil temporaire, pour lequel l’artiste mexicain s’est inspiré des anciennes salles de classe, afin d’élaborer une structure géométrique et minimale faite de tubes en métal et de panneaux de bois. Cette école voit jusqu’à fin juillet se dérouler un ambitieux programme quotidien de rencontres et débats avec des artistes, cinéastes, performeurs… Non loin de là, c’est le sculpteur argentin Adrián Villar Rojas qui s’est approprié avec maestria quelques salles emplies d’une colossale installation en ciment, La inocencia de los animales. L’ensemble se donne à voir tel un amphithéâtre partiellement détruit, comme figé après la catastrophe. Si les gradins sont encore debout, partout des fissures et un écrasement progressif qui semble patent avec l’impression que le plafond s’abaisse. Une cloche s’est enfoncée dans le sol tandis qu’à l’arrière tout s’est effondré. Et le visiteur de se retrouver perdu dans un entre-deux temporel.

Le sombre destin de l’environnement
Cœur du projet, l’exposition « Dark Optimism » se place sous le signe d’un activisme « arty » où l’accent est mis sur des considérations sociales relatives aux questions environnementales et climatiques. Il est heureux d’y revenir en arrière, aux fondements d’une réflexion qui commença à se faire entendre dès les années 1970. La même année 1972, Josef Beuys et ses étudiants balayent la Karl-Marx-Platz de Berlin après le traditionnel rassemblement du 1er mai en collectant les débris laissés par les manifestants (Sweeping), tandis que Gordon Matta-Clark imagine Fresh Air, soit des bouteilles permettant d’inhaler de l’oxygène pur. De Klara Lidén exposant bien plus tard des poubelles venues de différentes villes (Untitled (Trashcans), 2011) à Liu Wei filmant des travailleurs chinois trimant dans une décharge (Hopeless Lands, 2008) en passant par Taiyo Kimura qui, en 1997 arpentait le métro de Tokyo avec un sac en plastique sur la tête, il n’y a plus de doute… L’urgence est bien là, partout.

EXPO 1 : NEW YORK

Commissaire général : Klaus Biesenbach, directeur du MoMA PS1
Nombre de projets : 10
Nombre d’artistes : 40

EXPO 1 : NEW YORK

Jusqu’au 2 septembre, MoMA PS1, 22-25 Jackson Ave., Long Island City, New York, États-Unis, tél. 1 718 784 2084, www.momaps1.org, tlj sauf mardi-mercredi 12h-18h.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°394 du 21 juin 2013, avec le titre suivant : Alerte environnement

Tous les articles dans Création

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque