La HEAD de Genève suspend son partenariat avec une université israélienne

Delémont (Suisse). À la Haute École spécialisée de Suisse occidentale (HES-SO), prestigieuse institution regroupant 28 hautes écoles implantées dans 7 cantons, l’heure est à la prise de position politique : « Dans ce contexte de tension géopolitique, avance Luciana Vaccaro, rectrice de la HES-SO, il est important pour nous que les institutions avec lesquelles nous nouons des partenariats partagent nos valeurs. » Dans le sillage de Swiss-universities et de son guide pour une collaboration internationale responsable en 2022, et en réaction à l’appel au boycott lancé par le collectif Coordination étudiante pour la Palestine en mai 2024, un comité de pilotage – composé de la vice-rectrice, de 5 spécialistes des relations internationales et de 5 collaborateurs de la HES-SO – avait mis au point, à la fin de 2024, une méthodologie d’analyse de ses partenaires internationaux selon des critères liés au respect des droits humains, à la liberté académique et au droit international. À la suite d’une étude approfondie réalisée au printemps par le dicastère de l’enseignement, le rectorat a fait le choix, le 29 août, de suspendre le seul partenariat actif de la HES-SO avec une institution israélienne : l’accord de mobilité entre la Haute École d’art et de design (HEAD) de Genève et le Shenkar College of Engineering and Design, situé dans le district de Tel-Aviv. En cause, les multiples contributions de l’établissement hébreu à l’effort de guerre israélien.

« Nous avons constaté un lien trop étroit entre la faculté d’ingénierie de Shenkar et l’armée israélienne », explique Luciana Vaccaro. Au cours de son analyse, la HES-SO a pris connaissance du programme de recherche « Futur Soldat », qui vise à améliorer les équipements de l’armée. Financé par le ministère de la Défense israélien depuis 2023, ce programme réunit des chercheurs du département d’ingénierie des matériaux polymères et du département de génie chimique de la faculté d’ingénierie de Pernick, ainsi que des membres du centre de recherche textile du Cirtex (The David & Barbara Blumenthal Israel Center for Innovation and Research in Textiles). Début 2025, l’équipe a développé une fibre capable de changer de couleur en présence de gaz toxique. Le département de génie logiciel dispose quant à lui d’une filière « Défense et sécurité » depuis 2020, laquelle facilite les projets de fin d’études portant sur le renseignement et la sécurité, en coopération avec les services de Tsahal, la direction du renseignement militaire et des entreprises de sécurité.

Si l’annonce du rectorat constitue une réponse favorable à la lettre ouverte signée par 77 collaborateurs de la HES-SO en mai 2025, qui exhortait l’institution à rompre tout lien avec le Shenkar et deux autres universités israéliennes, le président du Shankar, Sheizaf Rafaeli, déplore quant à lui « une décision ni juste ni justifiée, qui porte préjudice aux étudiants des deux établissements ». Il poursuit : « Nos deux institutions défendent la recherche de la paix et de l’égalité. À Shenkar, nous mettons tout en œuvre pour défendre ces valeurs. Des étudiants de différentes communautés et origines ethniques, juifs, musulmans et autres, étudient à Shenkar dans une communauté harmonieuse, malgré la guerre qui fait rage autour de nous. Le 7 octobre [2023] est une plaie ouverte au cœur d’Israël, et il nous a tous touchés. […] J’appelle la direction de la HEAD à reconsidérer sa position. »