Profession

Conseiller en gestion d’activités artistiques

Par Sophie Flouquet · Le Journal des Arts

Le 3 février 2010 - 780 mots

Une poignée de professionnels prodiguent aux artistes des conseils de management sur mesure

Début janvier, les étudiants de l’École nationale supérieure des beaux-arts (Ensba) de Paris étaient invités, de manière facultative, à assister à un enseignement auquel leurs prédécesseurs n’ont pas été coutumiers. Deux conférences dédiées à la gestion de leur future carrière, et destinées à les éclairer dans le choix de leur statut mais aussi à optimiser leurs décisions comptables et fiscales, leur ont ainsi été proposées.

« L’idée est de sensibiliser les élèves aux grands principes afin qu’ils aient une meilleure maîtrise de leur économie et qu’ils évitent de faire de grosses erreurs », explique Bruno Ughetto, conseiller en gestion et management d’activités artistiques, qui dispense cet enseignement. L’économie aurait-elle ainsi pénétré le temple de la création ? « Les rapports entre art et économie ont longtemps été tabous, reconnaît Bruno Ughetto. Mais depuis dix ans, les artistes sont de plus en plus sensibles à la gestion de leur atelier. » 

Choisir son statut
Depuis 1996, Bruno Ughetto anime un cabinet spécialisé, « D’Autant plus Expertise et Conseils », dédié au management artistique. Si sa clientèle compte depuis le début de nombreux graphistes, photographes ou designers, les plasticiens viennent désormais grossir les rangs. Combiner le statut d’artiste affilié à la Maison des artistes avec la création d’une société, lorsque, par exemple, plusieurs artistes se regroupent au sein d’un même atelier, peut en effet s’apparenter au parcours du combattant pour un non-averti.

« L’économie a fait irruption partout dans la société », estime Bruno Ughetto, qui rappelle par ailleurs que la part des rémunérations informelles s’est fortement amenuisée, d’où ce besoin pour les artistes de sécuriser leurs revenus comme leur statut fiscal… « En France, les artistes bénéficient d’une législation très favorable, poursuit-il, mais elle est aussi très compliquée et change rapidement. » D’où une certaine difficulté lorsqu’il s’agit de choisir son statut ou d’optimiser ses charges sociales et ses impôts. « Les codes des impôts, de la sécurité sociale ou de la propriété littéraire et artistique sont nos outils, explique Bruno Ughetto. Il nous faut à chaque fois trouver la bonne équation du moment. »

D’Autant plus s’attache ainsi à prodiguer des conseils, mais aussi à gérer comptabilité et production de liasses fiscales, au cas par cas. « Toujours en parfaite légalité », insiste Bruno Ughetto, qui fait appel aux services de différents professionnels, experts-comptables mais aussi avocats spécialisés, en fonction des besoins de la clientèle. Une sorte d’arrière-boutique pour les artistes qui leur permet de mieux prendre en compte la dimension économique, fiscale et juridique de leur activité.

Déficit d’information
Véronique Chambaud, docteure en droit et consultante en management artistique, se consacre quant à elle à la formation, après avoir exercé le métier de conseil pendant plusieurs années. Elle est aussi l’auteure de plusieurs ouvrages destinés à donner les clefs aux artistes « qui n’ont pas forcément les moyens d’avoir recours à un conseil ». « Les artistes ne se voient pas toujours comme des professionnels, explique cette dernière. La première idée est de leur dire qu’il est possible de vivre d’une activité artistique. Puis je leur donne des outils et des informations relatives à toutes les obligations qui en découlent. » Car, à ses yeux, « le déficit d’information demeure très important ». Et les conséquences peuvent se révéler parfois très pénalisantes.

« J’ai récupéré de nombreux jeunes artistes peu de temps après leur sortie de l’école, confirme Bruno Ughetto. Ils avaient déjà eu le temps de faire un certain nombre de bêtises qui leur avaient fait perdre beaucoup d’argent. Il est parfois assez irresponsable de la part des écoles de jeter ainsi les élèves dans la nature ».
 
Si certains organismes, comme le Centre national des arts plastiques (CNAP), prodiguent via des publications des conseils aux professionnels, d’autres se limitent à leur champ, à l’instar de la Maison des artistes qui se contente d’une expertise en matière de protection sociale. D’où un développement très fort des cabinets spécialisés, « plus proche d’une culture artistique que de l’expertise comptable », souligne Bruno Ughetto. D’Autant plus a ainsi déjà ouvert des bureaux à Strasbourg et Lyon, tandis qu’un projet d’implantation à Marseille est à l’étude. Avec un objectif : « Ne pas être un promoteur d’artiste mais remettre l’économie à sa place dans sa carrière. Ni plus ni moins. » 

À lire

Véronique Chambaud, Guide juridique et fiscal de l’artiste, éd. Dunod, 2010, 4e édition, 25 euros, ISBN 9-7821-00530-915.

Véronique Chambaud, Art et fiscalité, éd. Ars vivens, 2009, 280 p., 58 euros, ISBN 9-7829-16613-109

Le site du Centre national des arts plastiques propose plusieurs fiches pratiques à destination des artistes, sous la rubrique « Ressources/Activités professionnelles » : www.cnap.fr

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°318 du 5 février 2010, avec le titre suivant : Conseiller en gestion d’activités artistiques

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