Profession

Céramiste

Par Valentine Buvat · Le Journal des Arts

Le 21 janvier 2005 - 740 mots

Le métier de céramiste continue de s’exercer dans des manufactures apparues en France au XVIIIe siècle, comme la Manufacture nationale de Sèvres.

La céramique a connu au XVIIIe siècle un développement considérable en France avec la création de nombreuses manufactures sur le territoire, dont les métiers continuent de s’exercer aujourd’hui. Ainsi, dans le paysage des arts décoratifs français de 1740, date de sa fondation par Louis XV, la Manufacture nationale de Sèvres n’était qu’un des lieux de production de cette porcelaine tendre qui ravissait les goûts raffinés de l’élite. Sans doute en raison de l’exceptionnelle qualité de ses productions et de ses origines royales, Sèvres s’est toujours attiré les faveurs des cours européennes et s’impose désormais comme le dernier témoin d’un savoir-faire directement hérité du Siècle des lumières. Chacune des pièces y est entièrement montée et décorée à la main, les artisans reproduisant des gestes ancestraux qui perdurent encore dans ce lieu historique. La mécanisation a été minimisée pour toujours pouvoir offrir la virtuosité et la finesse du geste manuel.

Les matières premières minérales qui entrent dans la composition des quatre pâtes à porcelaine de Sèvres sont broyées sur place très finement au « moulin », un atelier spécifique, avant d’être mélangées suivant des proportions précises. Un laboratoire de recherche est chargé de concevoir les innovations techniques ainsi que de créer les quelque 900 couleurs inscrites à la palette de la manufacture.

Les pièces sont d’abord dessinées avec précision. Ces modèles sur papier sont ensuite confiés aux techniciens chargés de la mise en forme. Puis un atelier de plâtre réalise les moules où seront coulées les pièces. Sèvres est le dernier lieu où l’on pratique le coulage « en source » ou « en fontaine », c’est-à-dire par en dessous grâce à des robinets reliés aux cuves de barbotines. Un technicien spécialisé s’acquitte seul de cette tâche pour l’ensemble de la manufacture.
D’autres objets, les services de table en particulier, sont tournés suivant une tradition disparue depuis 1880 ailleurs. Parce qu’elles sont fabriquées en rotation, les assiettes de Sèvres sont plus fines que les assiettes industrielles pressées. Trois étapes de tournage successives sont nécessaires à la fabrication des services qui sont ensuite contrôlés afin d’être aussi proches que possible du modèle préétabli. Les pièces reçoivent alors une première cuisson à 980 °C puis sont émaillées. La gestuelle séculaire nécessaire au trempage de l’objet dans un bain d’émail homogène n’est plus connue qu’à Sèvres, la projection étant devenue courante dans les autres manufactures. D’un geste précis, un artisan immerge en quelques secondes l’objet qui ressort couvert d’un demi-millimètre d’émail, une opération appelée le « trempage ». La marque d’origine dessinée par le peintre Mathieu en 1971 est ensuite apposée avant qu’une nouvelle cuisson à 1380 °C apporte à la pièce sa brillance définitive.

Couleurs de grand feu
Parallèlement, un atelier de sculpture façonne et retouche les célèbres biscuits dans l’attente de leur cuisson. Depuis 1751, les sculptures de la manufacture ne sont plus ni décorées ni émaillées, une unique cuisson à 1380 °C suffisant à leur conférer leur allure définitive.

Les décors, couvertes, fonds, peintures et or sont apposés sur les objets blancs. Les couleurs de grand feu telles que le célèbre bleu de Sèvres, qui reçoivent les cuissons les plus élevées, sont appliquées avant celles de petit feu dont les cuissons s’effectuent entre 920 °C et 800 °C. L’or pur à 24 carats est le dernier élément apporté au décor. Qu’il soit appliqué en frise ou au pinceau, le précieux métal sort mat du four. Un brunissage à la pierre d’agate puis au brunissoir d’hématite lui donne son aspect définitif, lisse et brillant.

Informations utiles

Formation : Cent vingt techniciens d’art travaillent à la Manufacture nationale de Sèvres. Cependant, les structures de la manufacture permettraient d’accueillir un plus grand nombre d’artisans. Recrutés sur concours, ils sont formés dans l’un des 27 ateliers spécialisés et permettent une production annuelle d’environ 5 500 pièces. Depuis 2003, l’établissement est un service à compétence nationale du ministère de la Culture et de la Communication, et la protection des techniques artisanales encore utilisées en son sein est au nombre de ses missions. Sèvres est une exception dans l’univers de la porcelaine.

Renseignements : Bureau des concours du ministère de la Culture et de la Communication, 4, rue de la Banque, 75002 Paris, www.culture.gouv.fr

Visite : Des visites de la Manufacture nationale de Sèvres sont organisées sur rendez-vous pour des groupes d’une vingtaine de personnes, http://manufacturedesevres.culture.gouv.fr

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°207 du 21 janvier 2005, avec le titre suivant : Céramiste

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