Disparition

Une fascination pour l’art

Par Philippe Régnier · Le Journal des Arts

Le 14 avril 2006 - 540 mots

Le galeriste parisien Philip Nelson, qui représentait des artistes tels que Thomas Schütte ou Thomas Ruff, s’est éteint le 3 avril.

 PARIS - « Personnellement, il était tout ce que l’on peut attendre d’un être humain, généreux et attentif, témoigne l’artiste Stéphane Calais. Pour les artistes, il était un vrai interlocuteur. Nous avions ensemble des discussions rares sur ce qu’est une œuvre d’art, sur comment cela fonctionne. Il était totalement investi dans l’art. » Le galeriste Philip Nelson est décédé le 3 avril à Paris des suites d’une longue maladie.
Né en 1956 à Tulsa, en Oklahoma, Philip Nelson avait quitté les États-Unis parce qu’il aimait l’Europe. Après avoir étudié la photographie en Suisse, il travaille dans ce pays pour une collection privée de photos. En 1982, il ouvre à Villeurbanne la galerie Gaston-Nelson, qui deviendra très vite la Galerie Nelson. À l’heure de la décentralisation culturelle et de la création des Fonds régionaux d’art contemporain, cet Américain fait le choix de l’agglomération lyonnaise par conviction, avec la volonté de s’ancrer localement. Il y présente en particulier le travail de BazileBustamante. Il se tourne aussi vers l’Allemagne, et organise en 1984 une exposition de Thomas Schütte. Puis viendront celles d’artistes tels que Reinhard Mucha, Harald Klingelhöller, Helmut Dorner, Thomas Ruff ou Rodney Graham, présentés parfois pour la première première fois en France. À la fin des années 1980, il déménage à Lyon dans un bel espace du centre-ville. Après mûres réflexions et discussions avec les artistes, il quitte Lyon et s’installe en 1993 à Paris, rue Quincampoix (4e arr.). Bien que nombre de créateurs qu’il représente aient déjà à l’époque une galerie dans la capitale, ils lui restent fidèles, comme il l’est envers eux. Ainsi, de Villeurbanne à Lyon et Paris, il aura par exemple consacré pas moins de onze expositions personnelles à Thomas Schütte. La galerie s’ouvre parallèlement à de jeunes artistes français, à l’instar de Didier Courbot, Guillaume Paris ou Stéphane Calais. Elle développe également une activité plus historique avec la gestion du fonds Robert-Filliou, constitué d’un ensemble important d’œuvres uniques et de multiples de l’artiste.

Entouré d’une communauté d’artistes
Dix ans après s’être installée au 40, rue Quincampoix, la galerie est transférée en octobre 2004 au 59 de la même rue, dans un nouvel et vaste espace de 200 m2 répartis sur quatre étages. Une salle vidéo est même aménagée en sous-sol. Tous les ingrédients sont alors réunis pour que la galerie Nelson poursuive sa progression sur la scène nationale et internationale.
Cette réussite, la galerie la doit à la personnalité même de Philip Nelson qui a construit une pensée de l’art, pris des risques, bâti un programme nourri d’exigence. « Il a réussi à constituer autour de lui une communauté d’artistes, de critiques, d’historiens de l’art, au-delà d’un épiphénomène de mondanité, précise le critique et écrivain Alain Cueff. Il avait une fascination pour ce qui n’allait pas de soi. » Proche des artistes, il savait les accompagner dans l’élaboration intellectuelle de leurs projets, cherchant impitoyablement à comprendre, avant de défendre leur travail pied à pied.
Philip Nelson avait souhaité que les activités de la galerie se poursuivent après sa disparition. Avec son équipe, il avait engagé une collaboration avec le marchand d’art et galeriste américain Peter Freeman.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°235 du 14 avril 2006, avec le titre suivant : Une fascination pour l’art

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