Royaume-Uni - Restitutions

ROYAUME-UNI

Une directive britannique facilite la restitution d’objets de faible valeur

Les musées nationaux sont exclus de cette mesure, leur politique de restitution restant soumise à leur statut.

Londres. Depuis le 27 novembre, certains musées britanniques peuvent rendre des objets de faible valeur sans demander d’autorisation préalable. Attendue depuis longtemps, cette directive vient modifier la loi de 2022 pour les musées qui ont le statut de « charity » (organisation caritative). Ce statut implique de poursuivre une mission d’intérêt public, ainsi, ici, préserver des collections et favoriser l’accès à la culture, mais aussi d’être réglementé par la Commission caritative, un organisme indépendant financé par le Trésor public. Avant cette directive, ces musées nécessitaient l’approbation de la commission pour faire un paiement ex gratia (à titre gracieux), c’est-à-dire un don ou un transfert sur la base d’une obligation morale.

« Cette directive supprime ainsi une couche de bureaucratie, les délais, mais aussi le risque de refus », indique Amy Shakespeare, chercheuse à l’université d’Exeter et fondatrice de Routes to Return, un site dont la vocation est de faciliter les restitutions. Néanmoins, les objets concernés doivent répondre à un critère de valeur strict et proportionnel. « Le seuil dépend du revenu brut du musée, explique Alexandre Herman, directeur de l’Institute of Art and Law. Si le musée est important et que ses ressources dépassent un million de livres par an [1,14 M€], ce seuil se situera à 20 000 livres [22 800 €] en valeur. » Ce seuil sera de 1 000 livres (1 140 €) pour des revenus inférieurs à 25 000 livres (28 600 €), de 2 500 livres (2 860 €) pour la fourchette de 25 000-250 000 livres (28 600-286 000 €) et de 10 000 livres (11 400 €) pour la fourchette de 250 000 livres à un million de livres (286 000 €-1,14 M€).

« Plus de clarté et de flexibilité »

Pour le gouvernement, l’objectif n’est pas de révolutionner les pratiques, alors que le recours aux versements à titre gracieux est rare pour de nombreux de musées. « Ces modifications législatives apportent plus de clarté et de flexibilité », a déclaré Christine Barker, responsable de l’autorité de régulation à la Commission. En revanche, les 16 musées nationaux ont été exclus de cette directive. Selon le gouvernement, l’objectif est de ne pas modifier le cadre statutaire existant. Certains de ces musées relèvent en effet de lois spécifiques qui leur interdisent formellement de donner, de restituer ou de transférer des objets de leur collection pour des raisons purement morales, sauf dans des circonstances très spécifiques (dans les cas de doublons ou d’objets impropres à la conservation). Deux exceptions sont également prévues : les restes humains de moins de 1 000 ans et les objets pillés pendant la période nazie.

Lorsque le changement de la loi était en discussion et que les conservateurs étaient au pouvoir, la question de l’exclusion des musées nationaux avait été laissée ouverte. « Alors que le Parti travailliste a gagné les élections, il aurait pu démontrer son soutien à la question des restitutions en incluant les musées nationaux, observe Amy Shakespeare. C’est une opportunité ratée. » Selon la chercheuse, la plupart des musées nationaux invoquent actuellement la loi comme « excuse pour ne pas se pencher sur la question des rapatriements ». Mais Amy Shakespeare estime que les motivations de l’équipe du Premier ministre travailliste Keir Starmer sont surtout politiques. « Le gouvernement craint des réactions négatives de la part de l’opposition de droite, juge-t-elle. Il craint aussi le risque que cela n’ouvre la voie à une avalanche de demandes concernant les musées nationaux. »

La loi prévoit toutefois que ces musées nationaux puissent effectuer de faibles « paiements moraux » à partir d’autres actifs, sans autorisation, pour des objets dont la valeur est inférieure aux seuils financiers applicables. Si ces musées nationaux possèdent de très vastes collections, le nombre de musées non nationaux enregistrés comme « charity » est toutefois estimé à plus de 2 300 au Royaume-Uni. Amy Shakespeare veut ainsi croire que le changement va dans le bon sens.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°667 du 12 décembre 2025, avec le titre suivant : Une directive britannique facilite la restitution d’objets de faible valeur

Tous les articles dans Actualités

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque