Découverte

Un tableau d’El Greco sort de l’ombre en Pologne

Par Maureen Marozeau · Le Journal des Arts

Le 22 octobre 2004 - 417 mots

L’œuvre avait été découverte dans la chambre d’un curé d’une paroisse du nord-est de Varsovie dans les années 1960. Elle vient de rejoindre les cimaises du Musée du diocèse de Siedlce.

 SIEDLCE - L’Extase de saint François, un tableau du Greco (1541-1614), vient d’être dévoilé au public dans le petit Musée du diocèse de Siedlce, situé à une cinquantaine de kilomètres à l’est de Varsovie. Le 14 octobre, l’œuvre a été au centre d’une cérémonie religieuse en la cathédrale de Siedlce, célébrée par Monseigneur Zbigniew Kiernikowski, en présence du primat de Pologne, le cardinal Jozef Glemp, et du nonce apostolique, Jozef Kowalczyk. L’évêque a ensuite bénit le tableau découvert par hasard il y a une quarantaine d’années par Izabella Galicka, alors jeune historienne de l’art à l’Académie des sciences (PAN), à Varsovie.
Accompagnée de sa collègue Hanna Sygietynska, Izabella Galicka s’était lancée, en 1964, dans l’exploration de la campagne polonaise à la recherche d’œuvres d’art oubliées. À Kosow Lacki, à environ 60 kilomètres au nord-est de Varsovie, la jeune femme a découvert le tableau suspendu au-dessus du canapé de la petite chambre du curé de la paroisse. Malgré l’encrassement de la toile, elle reconnaît immédiatement le style d’El Greco, « la touche, le regard du personnage, les couleurs ». Devant un ciel tourmenté hésitant entre le gris et le noir, saint François, vêtu d’une aube de toile beige retenue par une corde, se tient légèrement penché, les mains ouvertes en offrande au-dessus d’un crâne luisant.
Il aura fallu dix ans aux historiennes de l’art pour obtenir l’authentification du tableau. L’expertise de la peinture a confirmé la signature du maître d’origine grecque, et daté la réalisation entre 1575 et 1580. En 1974, la Pologne était encore sous le joug communiste et le concept de propriété privée n’existait pas, aussi l’évêché de Siedlce a-t-il préféré cacher la toile, de peur de la voir saisie par les autorités : « Si ce n’était la précaution de notre évêque, le tableau aurait pu se retrouver dans un musée national à Varsovie ou dans le bureau du premier secrétaire communiste », explique le Père Henryk Drozd, directeur du Musée du diocèse de Siedlce.
La légende veut que la toile, après avoir atterri dans un débarras du vieux clocher, ait échappé aux flammes. Estimé aujourd’hui plus de 3 millions d’euros, ce Saint François est l’un des trois tableaux signés d’une série de neuf représentant le saint avec les stigmates du Christ. Rares sont les musées polonais à conserver un chef-d’œuvre de cette importance.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°201 du 22 octobre 2004, avec le titre suivant : Un tableau d’El Greco sort de l’ombre en Pologne

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