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Un Musée Guggenheim à Helsinki ?

Par Maureen Marozeau · Le Journal des Arts

Le 3 janvier 2012 - 851 mots

Si l’étude de faisabilité menée par la Fondation Solomon R. Guggenheim et la mairie d’Helsinki ne sera rendue publique que le 10 janvier, la création d’un Musée Guggenheim dans la capitale finlandaise paraît très vraisemblable. Restent à connaître les détails de l’opération, comme son financement et la teneur des collections.

HELSINKI - C’est avec dix jours de retard que la Fondation Solomon R. Guggenheim et la mairie d’Helsinki dévoileront le résultat de l’étude de faisabilité d’un musée Guggenheim dans la capitale finlandaise, le 10 janvier prochain. L’étude avait été lancée il y a un an, et la ville et deux fondations culturelles s’étaient partagé la facture de 2,5 millions d’euros. Rappelons que la fondation américaine est habituée des projets avortés – Rio, Taichung, Vilnius, Tokyo, Singapour, Guadalajara… – et autant d’études de faisabilité facturées. À Helsinki, les rendez-vous consultatifs se sont enchaînés (responsables de musées, artistes, collectionneurs, designers, spécialistes du marketing…) et l’équipe américaine a répondu dans la mesure du possible aux interrogations des conseillers municipaux sur le financement, la teneur des collections, la mission pédagogique, le site envisagé… Le directeur de la fondation Guggenheim, Richard Armstrong, a souligné l’importance de l’impact visuel que doit avoir le bâtiment pour attirer les générations présentes et futures. Et s’il a réitéré son vœu d’impliquer la grande communauté d’artistes, de designers et d’architectes du pays, il n’a jamais perdu de vue le rayonnement international dont pourrait profiter son institution. Car cette aventure culturelle est aussi (surtout ?) économique. Rappelons ensuite que le gouvernement basque détient un droit de veto sur la création d’autres musées Guggenheim en Europe. Cette clause de non-compétitivité avait été négociée par le directeur du musée à Bilbao, Juan Ignacio Vidarte. Ce responsable de la stratégie internationale et directeur adjoint de la fondation a tenu un rôle central dans l’étude de faisabilité à Helsinki.

Helsinki n’est pas Bilbao
Un musée Guggenheim est-il vraiment souhaitable ? Helsinki est loin d’être le cimetière industriel et culturel qu’était Bilbao, et pourtant le succès basque est porté en exemple. En avançant que les Basques ont désormais une autre idée de leur ville, Richard Armstrong ne se méprend-il pas sur le sentiment national caractéristique d’un petit pays dont l’indépendance est récente ? Helsinki n’a pas besoin de rehausser l’image qu’elle a d’elle-même, mais s’efforce depuis quelque temps de rendre plus visible sa place sur l’échiquier international – en étant Capitale mondiale du design cette année, Capitale européenne de la culture en 2000, et en accueillant une partie des collections du musée Picasso de Paris en 2009 à l’Ateneum. Les musées finlandais sont déjà très nombreux, et leur situation actuelle est si délicate (lire l’encadré) que le débat sur la nécessité d’un tel projet est légitime. Certes, le Musée d’art contemporain inauguré en 1998 honore l’art finlandais, mais l’art international prend une place grandissante dans sa politique d’acquisition. L’argument principal est l’effet dynamisant du Guggenheim sur le tissu culturel de la ville, soit une hausse des fréquentations des autres musées. Et ce, alors que l’adjointe à la Culture de la mairie, Tuula Haatainen, expliquait il y a un an que la fermeture des espaces d’exposition du Musée municipal (le Tennispalatsi Art Museum, la Kluuvi gallery et le Meilahti Art Museum) serait une solution de financement. Ce à quoi pourrait s’opposer le directeur de ce musée, Janne Gallen-Kallela-Sirén, représentant de la mairie dans l’étude de faisabilité. D’autres sources bien informées parlent d’une fusion entre le Musée finlandais du design et le Musée d’architecture finnoise. Réponse le 10 janvier.

Menaces sur plusieurs musées

Alors que la ville d’Helsinki se dit prête à débourser des millions d’euros pour accueillir son musée Guggenheim, le ministère du Budget sabre les moyens de la Culture. Outre les cinq millions d’euros retirés au budget des institutions culturelles nationales, les frais de fonctionnement du Conseil national des antiquités, agence financée par le ministère de la Culture et de l’Éducation, voit son enveloppe réduite de 2,5 millions d’euros, soit 11 % de son budget annuel. Chargé de la protection du patrimoine et de l’archéologie, ce conseil gère dix-sept musées et sites historiques à travers le pays. Selon la directrice administrative du Conseil, Pirjo Hamari, la seule marge de manœuvre est l’amaigrissement de la masse salariale qui provoquerait la fermeture de certains sites. Parmi les institutions placées sous l’égide du Conseil, le site de Hvitträsk ; cette demeure-atelier construite par et pour les architectes et designers Eliel Saarinen, Herman Gesellius et Armas Lindgren au début du XXe siècle est un lieu fondateur du design finlandais. Sa directrice Pepita Ehrnrooth-Jokinen se dit pourtant confiante : « Hvitträsk est un musée si important, qu’il doit rester ouvert. C’est le seul musée du Conseil à être connu à travers le monde. […] Si les choses se passent vraiment mal, l’intégralité du Conseil pourrait fermer pendant trois mois, mais je n’y crois pas ». Les plus petits musées sont donc en ligne de mire, tandis que les plus grands augmenteront les prix d’entrée et réduiront leurs plages horaires. Le Conseil a ouvert des pourparlers avec son personnel en novembre. Jusqu’à soixante postes pourraient être supprimés d’ici la fin du mois de janvier.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°360 du 6 janvier 2012, avec le titre suivant : Un Musée Guggenheim à Helsinki ?

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