L’Orangerie revit

Les “Nymphéas”? remises en lumière

Par Daphné Bétard · Le Journal des Arts

Le 7 février 2003 - 740 mots

Célèbre pour abriter les Nymphéas de Monet, le Musée national de l’Orangerie, fermé depuis janvier 2000, fait enfin l’objet de grands travaux de rénovation et de restructuration. Pour restituer au bâtiment son aspect originel, éclairé par la lumière naturelle grâce à de nombreuses ouvertures, les architectes ont imaginé des solutions audacieuses.

PARIS - Lorsqu’en 1927 rouvre l’Orangerie des Tuileries, à Paris, les visiteurs découvrent les célèbres Nymphéas offerts par Claude Monet à la France au lendemain de l’Armistice de 1918. Baignée de lumière naturelle grâce à un dispositif de plafond vitré et de vélum textile, la grande frise se déploie en deux salles ovales situées dans la partie est du bâtiment. Depuis, le lieu a été amplement dénaturé, notamment dans les années 1960, lors de l’installation de la collection Walter-Guillaume. Un étage de béton fut alors construit sur presque toute la longueur de l’édifice, privant les Nymphéas d’un éclairage naturel ; la porte nord du vestibule fut condamnée, et l’accès direct à l’œuvre, obstrué par un vaste escalier circulaire en fer forgé. Après quelques réfections entre 1978 et 1984, le Musée national de l’Orangerie fait aujourd’hui l’objet de grands travaux de rénovation et de restructuration. “Depuis une vingtaine d’années, ce petit musée sur lequel on ne misait plus, est rentré dans une sorte de nuit médiatique. Heureusement, le public, de plus en plus nombreux au fil des ans, est resté conscient de la richesse des collections et de l’importance des Nymphéas, trésor historique moderne. C’est finalement lui qui nous a amenés à imaginer de nouvelles solutions, explique le directeur du musée, Pierre Georgel. Par ailleurs, la rénovation du musée du Jeu de paume, avec lequel l’Orangerie forme un diptyque, a fait apparaître la nécessité de s’occuper de ce dernier.” Cette proximité a failli coûter cher à l’Orangerie, puisqu’il fut même question de la vider entièrement pour y installer un vaste espace d’art contemporain. Finalement, en 1996, le ministère de la Culture opte pour un réaménagement complet, destiné à réhabiliter le bâtiment tel que l’avait conçu Monet et à exploiter sa disposition au sein du jardin des Tuileries. Une réflexion qui avait précédemment abouti à l’exposition “Monet, le cycle des Nymphéas”, en mai 1999 (lire le JdA n° 83, 14 mai 1999). À l’époque, il était annoncé que 78 millions de francs (un peu moins de 12 millions d’euros) seraient débloqués pour l’opération. Ce sont en réalité de 25 millions d’euros qui seront consacrés à ce vaste chantier. Fermé depuis janvier 2000, le musée devrait rouvrir ses portes fin 2004.

Une opération particulièrement délicate
Imaginé en 1997 par la direction du musée, de concert avec le département Programmation de l’établissement public du Grand Louvre, le projet global prévoit de supprimer l’escalier monumental qui barre l’accès direct aux Nymphéas et de rétablir le vestibule conçu par Monet, avec vue sur la Seine au sud, et sur le jardin au nord. Retenus en 1998, les plans de l’agence Brochet-Lajus-Pueyo ont ajouté une innovation fondamentale. Il s’agit de détruire l’étage en béton qui dérobait l’éclairage naturel aux Nymphéas, une entreprise très difficile à réaliser compte tenu de la fragilité du bâtiment. L’opération est d’autant plus délicate que l’œuvre de Monet restera en place durant tout le chantier. Sous la verrière reconstruite, des abat-jour permettront de réguler la lumière et, en dessous, un grand vélum textile recréera le dispositif d’origine. Les façades de l’Orangerie seront, quant à elles, rouvertes et offriront la possibilité de voir à travers la structure les terrasses sur la Seine et le jardin. Au centre de l’édifice, un pont de bois, évoquant le jardin de Giverny, permettra d’accéder aux Nymphéas, tandis qu’une large douve fera office de liaison entre les deux parties du musée. Un grand escalier de pierre mènera à la collection Walter-Guillaume, riche de 144 œuvres signées Cézanne, Renoir, Derain, Matisse, Picasso ou Soutine. Les toiles bénéficieront d’une présentation plus cohérente, d’espaces supplémentaires creusés en sous-sol et seront, elles aussi, éclairées par la lumière du jour (diffusée par la façade nord). Ainsi totalement dégagé, le rez-de-chaussée sera dévolu à l’accueil des publics. Dans la partie ouest seront installés les services administratifs, créés telle “une sorte de boîte indépendante en lévitation, précise l’architecte Olivier Brochet. Ce que nous construisons à l’intérieur ne touche pas les murs de l’Orangerie”. Enfin, l’accès au musée se fera à nouveau de plain-pied, du jardin des Tuileries aux Nymphéas, conformément à la volonté de Monet qui avait rêvé ce lieu comme un “asile d’une méditation paisible”.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°164 du 7 février 2003, avec le titre suivant : L’Orangerie revit

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