Musée

Stéphane Martin, président du musée

Les 10 ans du Quai Branly

Par Virginie Duchesne · L'ŒIL

Le 19 février 2016 - 665 mots

PARIS

Stéphane Martin est président de l’établissement public du Musée du quai Branly depuis décembre 1998.

Quelles ont été les évolutions du musée par rapport au projet initial ?
Stéphane Martin Il y a eu quelques changements architecturaux, effectués en lien étroit avec l’architecte du musée Jean Nouvel, pour améliorer le confort de nos visiteurs et développer notre programmation. Nous avons notamment dédié une vitrine à la photographie contemporaine, devenue peu à peu l’un des axes forts de la politique du musée en matière d’art contemporain. Nous souhaitions regarder les 710 000 photographies de notre collection sous l’angle artistique, et plus seulement documentaire, ce qui est relativement novateur dans un musée dit d’ethnologie. Par ailleurs, certaines évolutions sont devenues capitales, spécialement notre mission de diffusion. Cela passe par des collaborations avec des musées de régions, par le prêt d’œuvres et la présentation d’expositions temporaires. Mais aussi par la mise en place des Ateliers nomades, dispositif de démocratisation hors les murs mis en place en 2013, qui consiste à faire découvrir les collections et activités du musée en région parisienne, dans des écoles et des lieux publics par exemple. À l’international, au-delà des prêts d’œuvres et de la coproduction d’expositions, nous avons développé une dimension militante, très spécifique à notre sujet, pour faire partager dans d’autres pays notre ouverture à toutes les cultures. Le musée est le premier à avoir présenté une exposition d’art africain dans un musée national asiatique : « Fleuve Congo » a entamé sa tournée internationale à Singapour en 2011, à Shanghai et en Corée du Sud en 2013. Aujourd’hui à Mexico, elle sera présentée à Moscou en fin d’année.

Que souhaitez-vous développer ou renforcer dans les années à venir ?
En tant qu’institution publique culturelle et scientifique, le musée est également un outil social et éducatif. Nous allons donc continuer à développer nos actions hors les murs, dans les hôpitaux, les prisons et vers tous les publics « éloignés ». Nous poursuivrons aussi notre collaboration avec les musées de régions. Après la ville du Mans qui a déjà accueilli les expositions « Tarzan », « Fleuve Congo » et « Masques », le musée nouera bientôt un partenariat avec la ville de Rodez. Nous travaillons également en ce moment avec l’abbaye de Daoulas pour réaliser des expositions dans le Finistère, et une collaboration est envisagée avec le Musée des Confluences à Lyon. Enfin, nous souhaitons continuer à développer nos collaborations avec les pays d’origine de nos collections. Nous espérons notamment collaborer avec le nouveau Musée des civilisations noires de Dakar, qui ouvrira fin 2016.

Les collections du musée iront-elles là-bas ?
Il s’agira soit de dépôts,  soit de prêts d’œuvres ou encore de tournées d’exposition. Tout est envisageable. Nous avons des collections d’art africain majeures et une expertise scientifique reconnue. Nous serions ravis de contribuer au succès de ce nouveau musée.
Le propos très ouvert du musée a été l’objet d’incompréhensions quant à sa ligne idéologique.

Souhaitez-vous poursuivre dans ce sens ?
C’est en effet une approche nouvelle, car les musées d’ethnologie ont longtemps fonctionné sur un discours didactique. Le Musée du quai Branly a fait le choix d’un discours extrêmement ouvert, sans ligne idéologique, en privilégiant la qualité et l’authenticité de ce que nous présentons. Nous accueillons autant la parole de Lilian Thuram, président de sa Fondation contre le racisme, que celle de Philippe Descola, professeur au Collège de France. Nous ne sommes pas enfermés dans une discipline : 65 % de nos expositions sont réalisées par des personnalités extérieures au musée, françaises ou étrangères, des anthropologues, des historiens de l’art, des archéologues. Nous considérons le visiteur comme un partenaire dont on ne peut ignorer les informations qu’il reçoit par ailleurs, ni ses intérêts, parfois ses préjugés. Le musée doit donc s’adapter en permanence pour préserver une adéquation temporelle entre les grandes questions sociétales, les nouveaux usages des publics et sa programmation. C’est un défi passionnant. Le musée doit rester un lieu ouvert et tolérant, avec une vraie liberté de ton.

13,5 millions C’est le nombre de visiteurs reçus entre le 23 juin 2006 et le 31 décembre 2015.
97 expos ont été présentées en 10 ans, conçues par 134 commissaires différents.
80 000 œuvres ont été acquises par le musée en 10 ans.

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Cet article a été publié dans L'ŒIL n°688 du 1 mars 2016, avec le titre suivant : Les 10 ans du Quai Branly

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