Le « choc Schiele » ébranle les musées américains

Le Journal des Arts

Le 27 février 1998 - 500 mots

La saisie en janvier de deux tableaux de Schiele prêtés au Musée d’art moderne de New York (MoMA ) a ébranlé les musées américains. Le 12 février, une commission de la Chambre des Représentants a interrogé les directeurs de quatre institutions afin de résoudre le problème des biens juifs spoliés par les nazis.

WASHINGTON (de notre correspondant) - Devant la commission parlementaire, les directeurs de quatre grands musées de New York, Chicago et Washington ont an­noncé la création d’une commission spéciale (“task force”) chargée de traquer les œuvres volées aux juifs pendant la Seconde Guerre mondiale qui pourraient circuler sur le marché ou se trouver dans les musées américains. Elle devra s’attacher à préserver à la fois les intérêts des familles de victimes de l’Holo­causte et ceux des musées qui ont pu acheter en toute bonne foi des œuvres spoliées par les nazis. “La task force a déjà demandé la création d’un mécanisme de résolution amiable des revendications liées à la Seconde Guerre mondiale, comme la médiation, l’arbitrage ou d’autres formes alternatives au procès”, a déclaré Philippe de Montebello, directeur du Me­tropolitan de New York. Une nouvelle législation devrait guider les musées dans leurs futures acquisitions et obliger les États à examiner leurs collections. Un projet de loi pourrait par ailleurs prévoir une dotation aux organisations juives aidant les familles dans la recher­che des prises de guerre. Un représentant de New York a an­noncé l’in­tention de la Chambre de “trans­former en loi fédérale une décision de la Cour de l’État de New York demandant à tout acheteur d’une œuvre d’art d’effectuer une vérification, comme il le ferait pour une voiture d’occasion”.

Les directeurs de musées ont rappelé qu’il y avait eu moins d’une demi-douzaine de réclamations sérieuses sur de prétendues prises de guerre figurant dans leurs collections, et qu’ils avaient été très scrupuleux. “Au moins depuis la Seconde Guerre mondiale, nous avons établi la liste de toutes nos acquisitions dans notre rapport annuel, qui est largement diffusé dans le monde”, a ajouté Philippe de Montebello. Curieusement, les victimes des spoliations ou leurs descendants n’ont pas eu la possibilité de s’adresser à la commission parlementaire. Son président a tenu les victimes à l’écart parce qu’elles sont engagées dans des litiges, alors que le MoMA, lui-même en procès, a été invité à témoigner. Une action judiciaire a en effet été engagée pour établir la provenance de deux tableaux d’Egon Schiele, prêtés au MoMA (lire les JdA n° 53 et 54). Le musée estime que cette action remet en cause les accords entre institutions pour le prêt d’œuvres d’art et souhaite que les deux toiles soient rendues à la Fondation Leopold, à Vienne, à qui les réclamations devront être adressées. Mais pendant des décennies, toutes les demandes concernant des œuvres disparues sont restées sans réponse en Autriche ; et il est de notoriété publique que le gouvernement autrichien a caché pendant des années au monastère de Mauer­bach des œuvres non réclamées, vendues il y a deux ans sous la pression des Juifs américains.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°55 du 27 février 1998, avec le titre suivant : Le « choc Schiele » ébranle les musées américains

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