L’actualité vue par Guy Issanjou

Directeur des trois châteaux départementaux de la Drôme

Le Journal des Arts

Le 26 mai 2000 - 794 mots

Guy Issanjou dirige depuis 1998 les trois châteaux départementaux de la Drôme : châteaux de Grignan, des Adhémar et de Suze La Rousse. Ancien directeur de l’École municipale d’art de Grenoble (1986-1992) et de l’École nationale des beaux-arts de Lyon (1992-1998), il avait à l’époque dynamisé ces établissements en recrutant des artistes tels qu’Ange Leccia, Jean-Luc Vilmouth, Patrick Tosani, Bernard Frize… Architecte de formation et historien de l’art, il vient de créer le nouveau Centre d’art contemporain du château des Adhémar à Montélimar, où une exposition Jean Dubuffet, « L’Hourloupe ou la foire aux mirages », se tiendra du 17 juin au 17 septembre. Les « Fêtes nocturnes » du château de Grignan donneront quant à elles L’Étourdi de Molière, du 11 juillet au 26 août. Guy Issanjou commente l’actualité.

Votre commentaire sur la grève des écoles nationales d’art et le protocole signé ?
Le fait que ces écoles n’étaient pas reconnues comme participant pleinement de l’enseignement supérieur était un véritable problème. Il était normal de se battre pour récupérer ce statut. Mais le protocole signé avec le ministère de la Culture ne concerne que les huit écoles nationales ; il me semble dommageable que les écoles municipales n’aient pas été concernées. Cela jette un discrédit sur ces établissements qui ont fait beaucoup de travail et permis à la création contemporaine d’exister aujourd’hui.

Quels sont les objectifs du Centre d’art contemporain du château des Adhémar ?
En créant un centre d’art “public” dans le département de la Drôme, nous avons adopté une démarche de réappropriation citoyenne du patrimoine. La dimension pédagogique, sans démagogie, est essentielle à mes yeux. Pour l’exposition Dubuffet de cet été, nous avons choisi de montrer des pièces historiques issues de l’univers de l’Hourloupe plutôt que les dernières œuvres. Notre programmation n’a pas manqué de nous attirer les critiques d’un certain milieu de l’art, parisien et élitiste, voire réactionnaire. Des lieux comme le Magasin à Grenoble peuvent se permettre une programmation plus expérimentale que la nôtre ; de notre côté, tâchons de ne pas nous couper du milieu populaire en lui offrant des outils d’accompagnement. Depuis le début de l’année, nous avons exposé Yan Pei-Ming, Richard Texier, Philippe Louisgrand et six jeunes artistes récemment issus de résidences. Des sculptures de Tjeerd Alkema seront présentées cet automne.

Êtes-vous intéressé par une mise en réseau de votre Centre d’art à l’échelle européenne ?
Bien évidemment, mais pour l’instant, nous nous contentons d’une mise en réseau au niveau départemental ! Avec des structures comme Angles à Saint-Paul-Trois-Châteaux, Art 3 à Valence et Médiatic à Die.

Que pensez-vous du fait que le Festival de théâtre d’Avignon n’ait pas été associé au programme d’expositions consacrées à la Beauté cet été dans la Cité des papes ?
Ridicule ! C’est vraiment une faute incroyable. D’autant que la beauté contient en elle-même une dimension universelle. On est tous dans le même monde !

Et que vous inspire le budget de 58 millions de francs alloué à cet événement ?
Si Jean de Loisy a eu des moyens, tant mieux. Il ne faut pas se poser la question de l’argent, mais celle de la qualité. C’est un problème de contenu : sommes-nous en présence de véritables questionnements, les expositions se fondent-elles sur un support scientifique intéressant ? Le lien entre art ancien et contemporain est une bonne chose. Comme l’approche non conventionnelle de la manifestation, qui explore d’autres espaces que les arts plastiques, tels que le mysticisme et l’alchimie.

Contrairement à Avignon, la Biennale d’architecture de Venise a choisi pour thème “Moins d’esthétique, plus d’éthique”.
C’est une thématique provocante. La dimension esthétique peut au contraire aider à reposer la question du sens. L’unité est dans le tout. L’architecture est une seconde “peau” de l’Homme, un complément organique forcément beau.

Qu’attendez-vous de la prochaine Biennale d’art contemporain de Lyon ?
La création de cette biennale s’imposait, et elle est devenue un événement national incontournable. Thierry Raspail a toujours su choisir avec discernement les spécialistes des différents thèmes abordés à l’occasion des précédentes biennales. Je lui fais donc confiance.

La mort d’Eugène Leroy…
Eugène Leroy a apporté à la peinture une fraîcheur et une liberté que son grand âge n’avait absolument pas altérées. Il fait partie de ces gens qui ont eu un engagement radical : il n’a pas bougé d’un pouce, il a tenu jusqu’au bout sa position esthétique. C’était un grand peintre ; voilà un titre qui lui va bien. Il est toujours resté dans un propos de peinture, d’accumulation, dans une espèce d’“empégage” de peinture ! Mais le succès a été long à venir.

Quelle exposition récente vous a marqué ?
Daniel Buren à l’Institut d’art contemporain de Villeurbanne. Ces cabanes éclatées, tout à la fois peintures, sculptures et architecture, réunissent tout ce qui est épars dans l’art occidental. Cette exposition est un grand manifeste contemporain.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°106 du 26 mai 2000, avec le titre suivant : L’actualité vue par Guy Issanjou

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