Art et communication

La décence d’Indécence

Le Journal des Arts

Le 5 novembre 1999 - 429 mots

Peut-on rester décent pour lancer un produit qui porte le nom d’Indécence ? Oui, a répondu l’agence Louis XIV en signant la campagne pour le dernier-né des parfums Givenchy. Fils spirituel d’Organza mis sur le marché il y a trois ans, Indécence s’appuie sur le capital image de son aîné tout en lui donnant un coup de jeune.

Organza se targue de refléter l’ultra-féminité intemporelle et universelle. Positionnement qui paraît peu original et sans doute loin d’être unique dans le domaine de la cosmétique. C’est pourtant de la campagne conçue pour le lancement d’Organza que s’inspire celle qui vient de voir le jour pour Indécence. Les mêmes éléments entrent en jeu : on y retrouve le parti pris de la femme statufiée, proche d’une icône ou d’une déesse grecque, femme du siècle dernier mais aussi du prochain millénaire. Elle est vêtue de cette même robe blanche, mais avec un décolleté profond qui laisse voir la naissance des seins cachés par une main pudique ; clin d’œil – mais clin d’œil seulement – à l’indécence. Il ne s’agit pas “de cacher ce sein que je ne saurai voir”, la “créature” aurait pu être nue, mais de suggérer quelque insolence, envisager même quelque libertinage... Car cette “Divine” Organza Indécence est moins intouchable, plus accessible, plus sensuelle que sa consœur.

Le désert est également toujours présent. Il prend toutefois des couleurs plus sombres qui lui donnent un côté plus “moderne”, ou peut-être plus humain, plus vivant ? Sous les tonalités, l’ombre de Botticelli rôde... Le flacon coiffé de son bouchon-tiare, dessiné par Serge Mansau, fait encore partie du décor. Cette bouteille, en verre cristallin plissé, dont la forme évoque un corps féminin drapé d’un voile de mousseline, s’ouvre sur la silhouette longue et fine de la femme ainsi dévoilée. Le contenant et son égérie sont semblables, l’un est le miroir de l’autre, et inversement.

Est-ce le vent du désert d’Erfoud, au Maroc, où a eu lieu la prise de vue, qui donne ce mouvement de flou négligé à la chevelure de cette semi-déesse, ou le travail long et minutieux de retouche à la palette graphique ? Les deux. Le tout pour un résultat d’ensemble esthétiquement réussi. Cette volonté de changement dans la continuité a pour objectif de soutenir Organza tout en mettant le pied à l’étrier au lancement d’Organza Indécence.

Ça ressemble à une peinture. Ça ressemble à une illustration. Ça ressemble à de l’art. C’est simplement artistique et c’est déjà pas mal.

Agence : Louis XIV Directeur de création : Bertrand Suchet Directeur artistique : Miriam Derville Schoeller Photographe : Hiromasa

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°92 du 5 novembre 1999, avec le titre suivant : La décence d’Indécence

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