Justice

Jean-Luc Mélenchon condamné pour atteinte aux droits d’un artiste

Par Louise Wagon · lejournaldesarts.fr

Le 11 juillet 2023 - 601 mots

PARIS

Le chef de La France Insoumise doit verser 40 000 € à Combo pour utilisation non autorisée d’une de ses œuvres.

Jean-Luc Mélenchon. © Thomas Bresson, 2022, CC BY 4.0
Jean-Luc Mélenchon.
Photo Thomas Bresson, 2022

La Cour d’appel de Paris a condamné Jean-Luc Mélenchon et La France Insoumise (LFI) pour atteinte aux droits patrimoniaux et moraux du street artiste Combo. « C’est une victoire historique, car elle constitue la première jurisprudence rendue en France protégeant une œuvre de street art par le droit d’auteur », commente maître Nicolas Le Pays du Teilleul, l’avocat de Combo. 

Objet litige, l’œuvre intitulée La Marianne asiatique, est une peinture murale réalisée par Combo en 2017. Elle a été reprise sans autorisation dans les clips de campagne de Jean-Luc Mélenchon lors de l’élection présidentielle de 2017 et par La France Insoumise lors des élections municipales de 2020. En juin 2020, Combo avait accusé Jean-Luc Mélenchon d’avoir utilisé sa fresque sans autorisation et de l’avoir attribuée à STYX. Si en première instance la justice avait reconnu l’originalité et la paternité de Combo, le tribunal avait néanmoins rejeté sa demande de protection au titre du droit d’auteur. 

Combo, Marianne asiatique, 2017, peinture murale utilisée sans autorisation dans un clip de campagne de La France insoumise. Courtesy Combo
Combo, Marianne asiatique 2017, peinture murale utilisée sans autorisation dans un clip de campagne de La France insoumise.
Courtesy Combo

Combo a interjeté appel, réclamant à l’homme politique et son parti plus de 900 000 euros pour contrefaçon, atteinte à ses droits d’auteur et préjudice moral. Le street artiste « se plaignait principalement de la récupération politique de son travail et d’une atteinte à sa réputation », précise le communiqué de son avocat. 

Contestant l’atteinte aux droits d’auteur, Jean-Luc Mélenchon et LFI ont invoqué l’exception de panorama, qui exempte de droits d’auteur l’utilisation d’œuvres architecturales, graphiques ou plastiques, placées en permanence sur la voie publique et réalisées par des personnes physiques et sans but commercial. Selon eux, l’œuvre en question était « placée sur la voie publique et apposée sur un ouvrage architectural de façon permanente »

La cour d’appel a considéré le contraire, affirmant qu’une œuvre de street art, notamment constituée en partie de papier collé comme celle en question, ne peut être considérée comme « placée en permanence sur la voie publique », en raison de sa vulnérabilité aux aléas extérieurs tels que les dégradations volontaires, l’effacement par le propriétaire du support ou les altérations dues aux intempéries.

Il est également reproché à Jean-Luc Mélenchon et LFI d’avoir intégré l’œuvre dans les clips de campagne de manière délibérée, « dans une recherche esthétique qui révèle l’intention du réalisateur d’en faire un élément important du clip et d’exploiter l’œuvre en l’associant au message politique diffusé ». De plus, l’ajout non autorisé du signe LFI et son intégration partielle dans un support visuel, ainsi que l’ajout d’éléments tels que des branchages et des oiseaux en filigrane, constituent une atteinte à l’intégrité de l’œuvre. 

La cour d’appel reconnaît que l’utilisation de la fresque dans les vidéos litigieuses est « dénuée de toute outrance ou polémique et s’inscrit dans la lignée des valeurs républicaines et citoyennes revendiquées par LFI ». Cependant, elle estime que cette utilisation porte « atteinte à l’intégrité spirituelle de l’œuvre » dans la mesure où celle-ci a été utilisée en soutien à l’action politique du parti et de son leader, sans l’autorisation de l’artiste. Cette utilisation pourrait être « de nature à faire croire » que l’auteur soutient ou est associé à LFI et Jean-Luc Mélenchon. 

La cour d’appel a donc infirmé la décision du tribunal judiciaire de Paris qui avait rejeté les demandes du street artiste en 2021, et a ordonné à Jean-Luc Mélenchon et LFI de verser 40 000 euros à l’artiste. Selon l’arrêt en date du 5 juillet, Jean-Luc Mélenchon et LFI devront payer solidairement 15 000 euros au titre du « préjudice moral » subi par l’artiste, et 5 000 euros chacun pour « réparation de son préjudice patrimonial ». A ces sommes, s’ajoutent 15 000 euros de frais de justice. 

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