Biennale

Gilles Alvarez : « La thématique des identités numériques soulève mille questions »

Par Stéphanie Lemoine · L'ŒIL

Le 25 octobre 2023 - 610 mots

Pour sa 5e édition, la Biennale Némo sonde les mutations de l’identité à l’ère digitale. Gilles Alvarez, son directeur artistique, nous présente l’événement.

Pouvez-vous nous présenter la Biennale ?

Némo a d’abord été un festival dédié aux nouvelles images. Nous avons adopté un format biennal depuis 2015. Aujourd’hui, tous les partenaires, soit 22 lieux en Île-de-France, travaillent autour d’une thématique commune, suffisamment ouverte pour donner lieu à une grande diversité de propositions. Cette année, par exemple, on peut voir une exposition sur les interfaces cerveau-machine au Cube (Garges-lès-Gonesse) ou sur le transhumanisme au Lavoir numérique (Gentilly).

Le thème de cette édition reprend une formule de Rimbaud : « Je est un autre ». Pourquoi ce choix ?

Nous ne voulions pas aborder l’identité sous l’angle identitaire, qui nous paraît nocif. Nous voulions plutôt explorer nos façades sociales en ligne et permettre à chacun d’expérimenter « l’effet Protée », c’est-à-dire la manière dont nos avatars nous influencent. La thématique des identités numériques soulève mille questions et offre d’aborder des sujets sociétaux qui ne sont pas toujours traités par l’art contemporain. Elle résonne particulièrement chez les publics lycéens. Or, une biennale numérique doit avoir un aspect pédagogique.

L’exposition semble postuler que les identités multiples sont aussi le fruit d’hybridations…

Oui ! Et, pour autant, on n’oublie pas de rappeler que le transhumanisme veut précisément nous vendre ce genre d’hybridation. « Je est un autre ? » essaie de conjuguer cette obsession avec la poésie, la science et la science-fiction. Dans Sève élémentaire, Fabien Léaustic donne ainsi la possibilité aux spectateurs de créer des chimères à partir de leur ADN. Dans ExoForm, NeoConsortium propose de créer la première œuvre visible de l’espace. Ce gigantesque canular, qui caricature la géoingénierie, offre une autre manière d’être technocritique.

Malgré une thématique exigeante, l’événement se veut accessible au plus grand nombre.

Avant même que la production de Némo n’ait été confiée au Centquatre-Paris, son mot d’ordre était « expérimental pour les masses ». Pour André Malraux, l’émerveillement et la beauté sont une entrée vers la culture. La biennale se situe dans cette lignée-là. Contrairement à l’art contemporain, qui parle peu des technologies, l’art numérique flirte parfois avec les sciences et peut être aussi stupéfiant que les entreprises dont il dresse la critique. Avec Némo, on espère attirer des spectateurs qui ne sont pas forcément habitués au numérique, mais qui, à travers nos expositions, peuvent s’interroger sur la manière dont celui-ci façonne nos vies.

Quels sont les autres temps forts de la biennale ?

L’un des événements phares, également au Centquatre-Paris, sera le symposium consacré à Christopher Nolan le week-end des 25 et 26 novembre. Celui-ci propose de parler d’art et de science en invitant des scientifiques, des sociologues, des artistes, etc. à décortiquer un chef-d’œuvre du 7e art. C’est une manière très intéressante de traiter des sujets tels que les personnalités multiples, les voyages dans le temps, la question de l’atome, etc. La biennale propose aussi beaucoup de spectacles : j’attends avec impatience Chutes, le nouveau spectacle de Franck Vigroux (à la Mac de Créteil), et la performance en réalité virtuelle Crari or Not d’Émilie-Anna Maillet au Théâtre Les Gémeaux (Sceaux). Enfin, le Grand Soir numérique à la Philharmonie de Paris, le 8 décembre, promet d’être un temps fort.

« Némo veut observer l’évolution de la société à travers le regard d’artistes vivants, à l’œuvre, qui cherchent à se confronter au public, à lui plaire à travers des pièces séduisantes, mais aussi à le bousculer ». José-Manuel Gonçalvès, directeur du Centquatre-Paris, Télérama.


104 000 SPECTATEURS 

ont participé à la précédente édition, entre le 9 octobre 2021 et le 9 janvier 2022.


22 

C’est le nombre de lieux partenaires de la Biennale Némo en Île-de-France8 expositions ont lieu pendant la biennale.

À voir
Biennale Némo« Je est un autre ? »,
Centquatre-Paris, 5 rue Curial, Paris-19e,jusqu’au 13 janvier 2024,www.biennalenemo.fr
Gilles Alvarez.
Diplômé en sciences politiques, il est le fondateur et le directeur artistique de la Biennale internationale des arts numériques de Paris/Île-de-France, produite par le Centquatre-Paris.

Thématiques

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°769 du 1 novembre 2023, avec le titre suivant : Gilles Alvarez : « La thématique des identités numériques soulève mille questions »

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