Culture : les interrogations du chancelier Schröder

Par Emmanuel Fessy · Le Journal des Arts

Le 9 octobre 1998 - 455 mots

Après la victoire du SPD aux élections du 27 septembre et l’arrivée de Gerhard Schröder à la Chancellerie, l’Allemagne va avoir pour la première fois un responsable au niveau fédéral pour la Culture : Michael Naumann. Une nomination qui s’inscrit dans la renaissance de Berlin comme capitale.

BONN. Ni pendant la République de Weimar, ni même sous le règne du Kaiser, l’Allemagne n’a eu de ministre de la Culture. Seul, le troisième Reich a imposé un ministre de la Propagande et de l’Éducation du peuple. Pour conjurer le spectre du nazisme, la constitution de la République fédérale d’Allemagne a évidemment réservé les compétences en matière de Culture aux villes et aux régions (Länder) qui assurent 90 % du financement des dépenses. Mais plus de cinquante ans après l’effondrement du Reich, au moment où une nouvelle génération arrive au pouvoir, ce fédéralisme est remis en question. D’autant plus que s’achève la reconstruction de la capitale de l’Allemagne réunifiée : le Parlement va réoccuper le Reichstag dès le mois de mai, le gouvernement devrait s’installer à Berlin fin 1999. Pour certains, le fédéralisme et son nécessaire éparpillement a pour défaut de priver l’Allemagne d’une “vitrine” culturelle capable de rivaliser avec Londres ou Paris. C’est dans cet esprit que Gerhard Schröder a fait appel, durant sa campagne, à Michael Naumann, étranger au sérail politique bien qu’il ait sa carte du SPD. Après des études de philosophie et dix ans de journalisme à Die Zeit et Der Spiegel, il est devenu gérant de l’une des grandes maisons d’édition allemandes, Rohwolt, avant de s’expatrier aux États-Unis pour présider Metropolitan Books/Henry Holt. Sa tâche à la Chancellerie sera de coordonner les dépenses des différents ministères en matière de Culture et d’assurer la représentation allemande à l’étranger. Il entend aussi porter Berlin au rang de capitale culturelle européenne et lui faire incarner le nouveau souffle de l’Allemagne réunifiée. Plusieurs décisions importantes du dossier berlinois ont, en effet, été reportées au lendemain des élections, comme la construction du mémorial de l’Holocauste. Vigoureusement défendu par Helmut Kohl, le projet a été sévèrement critiqué par Michael Naumann. Un monument “élégant, esthétique ne suffit pas” pour exprimer l’horreur des camps de la mort, a-t-il jugé. Il serait, en revanche, favorable à la reconstruction du château des Hohenzollern – détruit par les communistes –, réclamée par des associations berlinoises. Par ailleurs, le poste de président de la Fondation pour la culture prussienne, qui gère l’ensemble des musées berlinois, est vacant. Or, après l’ouverture de la nouvelle Gemäldegalerie, l’avenir de l’Île aux musées est capital pour la renaissance de Berlin. À en croire ses déclarations durant la campagne, ses premiers efforts vont néanmoins porter sur le cinéma. Il veut se rendre aux États-Unis pour défendre la création allemande.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°68 du 9 octobre 1998, avec le titre suivant : Culture : les interrogations du chancelier Schröder

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