Portrait

Cécile Bart : bain de lumière et de couleurs

Par Philippe Piguet · L'ŒIL

Le 25 janvier 2012 - 553 mots

Dès qu’un simple rai de lumière apparaît et vient déposer une tache lumineuse sur le tissu Tergal de l’une de ses peintures collages, le regard de Cécile Bart s’illumine. Il suffit qu’une personne passe derrière l’une d’elles pour qu’aussitôt l’artiste se saisisse de son appareil photo et la fixe sur la pellicule.

Aux jeux d’ombre et de lumière, d’apparition et de disparition, de transparence et d’opacité, la démarche de Cécile Bart trouve forme dans une savante et subtile occupation de l’espace, comme elle en a actuellement l’occasion à Sérignan.

Dans l’une des salles – un grand volume rectangulaire partagé par trois cimaises inamovibles dont le sol réfléchissant fait ricocher la lumière –, elle a réalisé une installation tout à la fois monumentale et minimale, dressant dans l’espace d’immenses écrans de Tergal dont les figures géométriques se déclinent en écho sur les murs et les cimaises tout autour. Le spectateur qui y déambule y fait une troublante expérience, immergé qu’il est dans l’immatérialité de la peinture, voire pris de vertige entre les jeux velléitaires des reflets qui vont et viennent. Coutumière de ce genre de situation, Cécile Bart en a une parfaite maîtrise et le principe qui gouverne la façon dont elle occupe l’espace relève non de l’application d’un protocole préliminaire mais d’une règle de jeu que lui suggère le lieu où elle intervient.

Dans la lignée de Malevitch
Cette intelligence du rapport de l’œuvre au lieu qui doit beaucoup à l’exemple historique de l’art minimal et à son fondement phénoménologique de la perception conduit l’artiste à inventer chaque fois de nouvelles formulations assurant son travail d’une régénération permanente. La démarche de Cécile Bart a ceci de prospectif qu’elle procède de la dualité d’un émerveillement et d’une révélation, l’une étant la résultante de l’autre, et sa force plastique tient à la mise en jeu d’une totale économie de moyens. Son art s’inscrit ainsi dans la lignée d’une pensée suprématiste telle que l’a développée Malevitch pour ce qu’il quête après une certaine idée du sublime, entendu au premier sens du mot. Le concept de formes en navigation dans l’espace lui est d’ailleurs familier ; elle l’a déjà mis en œuvre à plusieurs occasions et le remettra prochainement dans le cadre de l’exposition qu’elle prépare au Mamco de Genève [du 22 février au 6 mai 2012].

Quand bien même elle trouve son origine dans celle de la peinture sur papier huilé utilisée pour les boîtes optiques du XVIIIe siècle, la technique d’écran qu’emploie Cécile Bart est pour le moins singulière. La peinture y est tout d’abord appliquée à larges coups de brosse sur tissu tergal puis soigneusement essuyée pour en libérer la trame. Le tissu est ensuite tendu et collé à ras sur les montants d’un châssis de sorte que le champ pictural ne connaisse visuellement aucun obstacle. Ce faisant, l’artiste instruit les termes d’une esthétique qui joue paradoxalement de l’idée duelle d’écran et de traversée, et lui permet d’accaparer l’espace, invitant le regardeur à l’expérience d’une immersion dans la couleur.

Biographie

1958 
Naissance à Dijon.

1998-2001 
Façade de l’hôpital Saint-Joseph et Saint-Luc à Lyon.

2002-2005 
Diptyque pour la tapisserie de la Manufacture des Gobelins, à Paris : De l’autre côté.

2011 
Reçoit le prix Aurélie Nemours. Vit et travaille en Bourgogne.

Cécile Bart est représentée par les galeries Chez Valentin (Paris-3e) et Catherine Issert (Saint-Paul, 06).

« Cécile Bart, l’hypothèse verticale »

Musée régional d’art contemporain, Languedoc-Roussillon (Sérignan (34), jusqu’au 26 février 2012.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°643 du 1 février 2012, avec le titre suivant : Cécile Bart : bain de lumière et de couleurs

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