Droit

La justice précise le point de départ de l’action en paiement du droit de suite

Par Alexis Fournol (Avocat à la cour) · lejournaldesarts.fr

Le 24 mars 2015 - 516 mots

PARIS

PARIS [24.03.15] - Le TGI de Paris a récemment précisé que faute de connaissance par l’ADAGP de sommes lui étant dues au titre du droit de suite, la prescription de l’action en paiement ne commence pas à courir. Les intermédiaires professionnels du marché de l’art, responsables du paiement, doivent tout à la fois déclarer les sommes dues et les mettre en réserve.

Une galerie avait omis de déclarer à l’ADAGP pour les années 2007 à 2012 les montants dus au titre du droit de suite à l’occasion des différentes ventes réalisées d’œuvres éligibles au mécanisme prévu par l’article L. 122-8 du code de la propriété intellectuelle. Or, une telle obligation de déclaration pesait nécessairement sur la galerie, celle-ci étant en sa qualité de professionnel responsable du paiement de ce droit.

Et malgré une déclaration en 2013 par la galerie d’un montant qui aurait correspondu aux exercices des années 2008 à 2012, l’ADAGP maintenait sa demande d’expertise considérant la déclaration effectuée comme douteuse. L’expertise achevée, il apparaissait que la galerie était encore débitrice de près de 40 000 euros pour les années 2007 et 2008. Cette dernière invoqua alors la prescription de l’action en paiement afin d’échapper à ses obligations pour l’année 2007.

Si une telle action est soumise à un délai de prescription de cinq ans, conformément à l’article 2224 du code civil, encore faut-il déterminer avec soin le point de départ de ce délai. A cet égard, le tribunal retient que « il est constant dans le cas où la créance dépend d’éléments qui ne sont pas connus du créancier en particulier parce qu’ils doivent résulter de déclarations que le débiteur est tenu de faire, le délai ne court pas tant que ces éléments ne sont pas portés à la connaissance du créancier ».

Pure application des règles relatives au délai de prescription des actions mobilières, combinées à l’article R. 122-10.II du code de la propriété intellectuelle, la solution s’imposait. En cas de défaillance de déclaration de la part du professionnel responsable du paiement du droit de suite, la prescription de l’action en paiement ne commence pas à courir. La date du point de départ correspondra alors au jour de la connaissance des éléments dont dépend l’existence de la créance, c’est-à-dire des sommes dues au titre du droit de suite.

La dernière précision apportée par la présente ordonnance concerne la charge de la preuve relative à la qualité de première vente d’une œuvre, qualité permettant d’écarter l’application du mécanisme du droit de suite. La galerie soutenait, en effet, que deux œuvres de Georges Rouault avaient été pour la première fois vendues par les ayants droit de l’artiste en 2008. Mais faute d’en rapporter la preuve, ou un commencement de preuve, la galerie ne pouvait aucunement soutenir qu’il s’agissait d’une première vente et échapper ainsi au paiement des sommes dues à l’ADAGP.

Enfin, l’absence de déclaration dans les trois mois suivant la fin du trimestre civil au cours duquel a eu lieu la vente donnant pris à la perception du droit de suite est sanctionnée par une contravention de troisième classe, soit au maximum 450 euros.

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La salle des Pas-Perdus du Tribunal de Grande Instance de Paris © Photo Kan_d - 2006 - Licence CC BY-SA 3.0

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