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Une nouvelle méthode pour dater une peinture au carbone-14

Par Alice Fiedler · lejournaldesarts.fr

Le 31 juillet 2020 - 431 mots

PARIS

Le CEA a extrait du blanc de plomb, un pigment répandu de l’Antiquité au 19e siècle pour effectuer une datation au carbone-14. 

Matériel carbone 14 © Photo Patafisik, 2016
Matériel pour la datation au carbone 14, Musée archéologique du lac de Paladru, Charavines, Isère.
© Photo Patafisik, 2016

La datation des pigments fait partie de la palette des outils pour authentifier une œuvre. Des chercheurs ont réussi pour la première fois à dater des fresques de la fin du Moyen Âge, issues du château de Germolles (Bourgogne) et de l’église des Cordeliers à Fribourg (Suisse), à l’aide du carbone-14. Les résultats ont été publiés dans la revue Scientific Reports en juin dernier.

La méthode était déjà employée pour dater des peintures, mais nécessitait l’extraction de matières organiques. Or, les liants, d’origine organique, sont en général dégradés. Quant au support, tel du bois, il peut être antérieur à la peinture même. Les pigments, souvent créés à base de broyage de matières inorganiques, sont inutilisables pour la mesure de carbone-14. 

Cependant, le Laboratoire de mesure du carbone 14 (LMC14) au centre CEA Paris-Saclay a découvert une présence de carbone-14 dans le blanc de plomb, un pigment utilisé de l’Antiquité au 19e siècle, puis interdit à cause de sa toxicité.

Le blanc de plomb était non pas fabriqué par broyage, mais par synthèse chimique : en désagrégeant le plomb avec des matières organiques de fermentation, comme du vinaigre ou du crottin de cheval.

« Le blanc de plomb est un pigment très largement utilisé par les plus grands artistes », explique Lucile Beck, chercheuse au CEA et responsable du LMC14. « Il est également appliqué en sous-couche sur la plupart des tableaux. Cette sous-couche débordant souvent du cadre, il pourrait être envisagé de prélever de la peinture à cet endroit sans dégrader l’œuvre. » 

Parmi les grands artistes ayant utilisé blanc de plomb, on trouve Rembrandt, Léonard de Vinci, Vermeer, Van Gogh, ou encore Goya.

Lors de la procédure de datation, les chercheurs isolent le carbone du blanc de plomb en chauffant les échantillons à basse température. Dans ces conditions, seuls les atomes de carbone s’échappent sous forme de CO2, facile à récupérer. Le temps de décomposition du carbone est ensuite mesuré pour déterminer l’âge du blanc. 

Le carbone-14 est un élément radioactif dont les atomes se désintègrent très lentement : sa « demi-vie » est de 5 730 ans. Il s’assimile avec l’oxygène et est présent dans des matières organiques (plantes, animaux, humains) qui l’intègrent en respirant et en mangeant. Des archéologues ont pu, grâce à cela, donner un âge précis à des fossiles, momies et squelettes. 

D’autres techniques scientifiques existent pour enquêter sur l’authenticité d’une peinture, à l’instar de la radiographie aux rayons X. Toutefois, selon Scientifc Reports, la méthode au carbone-14 reste la méthode plus sûre.

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