Ventes publiques caritatives

Une brique dans la mare

Par Armelle Malvoisin · Le Journal des Arts

Le 15 mars 2011 - 739 mots

Quand les artistes d’art contemporain se mobilisent pour des causes charitables,avec la complicité des maisons de ventes.

PARIS - C’est tout un art que d’organiser une vente aux enchères au profit d’une action sociale, humanitaire ou médicale. Pour le porteur du projet à financer, il s’agit de trouver des lots à vendre et les acheteurs potentiels. Quand les artistes sont mis à contribution, c’est payant. L’engouement du public pour l’art contemporain élargit le cercle restreint des bienfaiteurs à un plus vaste champ de collectionneurs. Le plus gros succès du genre revient à la vente « RED » organisée par Bono – le chanteur de U2 –, en faveur des femmes et enfants victimes du sida en Afrique : 83 œuvres d’artistes contemporains internationaux les plus cotés du moment avaient été réunies. L’ensemble avait rapporté 42,5 millions de dollars (30 millions d’euros), le 14 février 2008 à New York chez Sotheby’s. « Nous sommes régulièrement sollicités pour tenir le marteau lors de ventes au profit de causes tout aussi défendables liées aux enfants ; à la lutte contre les maladies, la faim, la pauvreté ; aux catastrophes naturelles ou encore à l’écologie, rapporte Pierre Mothes, commissaire-priseur chez Christie’s à Paris. Nous sommes consultés techniquement sur le déroulement des ventes et prêtons nos locaux si besoin. Mais nous ne sommes pas à l’origine du « sourcing » des lots proposés dont la qualité fait indéniablement venir les acheteurs. Sauf exception… ». L’exception, c’est la vente « A.V.E.C. » (Association pour la vie et l’espoir contre le cancer) organisée chez Christie’s à Paris, le 17 mars 2009, à l’initiative de François Pinault. Le collectionneur et patron de la maison de ventes avait sollicité 28 artistes dont il est proche, parmi lesquels Jeff Koons, Damien Hirst, Subodh Gupta, Richard Prince, Richard Serra, Martial Raysse… La vente a récolté 4,6 millions d’euros, contre 3 millions d’euros d’estimation.

Le commissaire-priseur Pierre Cornette de Saint Cyr est un habitué de tels événements, avec une moyenne de cinquante ventes annuelles dédiées à différentes actions. Les associations ne viennent pas seulement le chercher pour son charme irrésistible au marteau qui met les enchérisseurs en confiance, mais aussi pour son réseau d’amis artistes. L’Unicef, qui fait régulièrement appel à lui pour sa levée de fonds annuelle, lui a demandé il y a quatre ans de faire venir des artistes pour augmenter ses recettes. Dans sa dernière vente, le 7 décembre 2010 à Drouot-Montaigne, 285 000 euros ont pu être amassés, en grande partie grâce aux créations de Koons et Hirst, et 500 000 enfants du Darfour ont ainsi pu être vaccinés. 

La brique en tableau
Deux ventes d’art contemporain en faveur de causes nobles s’annoncent chez Artcurial. La première, le 28 mars, a été organisée par le producteur de cinéma Charles Gassot, président et fondateur de l’association Écoles du monde, visant à construire des écoles à Madagascar. Elle a nécessité un an de préparation. N’étant pas du sérail, il a mis du temps à convaincre des artistes, tout en leur imposant une brique de terre compactée comme support de création et une mise à prix fixée à 500 euros. In fine, plus de 100 artistes plasticiens, illustrateurs, designers et architectes ont répondu à l’invitation, parmi lesquels Lawrence Weiner, Gérard Garouste, Bernar Venet, Enki Bilal, Pierre Charpin ou encore Mathieu Mercier. La vente devrait porter ses fruits. Pierre Soulages a ainsi traité sa brique comme un tableau. Selon le commissaire-priseur François Tajan, « l’œuvre pourrait atteindre les 10 000 euros ».

La somme qui sera récoltée à l’issue de la vente du 28 avril est, elle, destinée à l’association parisienne Saint Louis en vue de l’achat d’un séquenceur permettant de viser avec précision les cellules malades des personnes atteintes de leucémie. La cause a touché le Suisse Felice Varini. « Je suis sorti de mon rôle habituel d’artiste pour inciter mes amis plasticiens à donner une œuvre de leur choix », raconte-t-il. Tout a été bouclé en quatre mois. Bertrand Lavier, Daniel Buren, François Morellet et Michel Verjux font partie du casting. Rares sont les artistes ayant imposé un prix de réserve à la vente de leur œuvre. En outre, les pièces qui ne seront pas vendues seront données à l’association qui pourra les remettre sur le marché ultérieurement. 

100 BRIQUES
Mise à prix : 500 euros pièce
Nombre de lots : 111

SÉQUENCE 1
Fourchette de prix : de 300 à 30 000 euros
Nombre de lots : 100

100 BRIQUES POUR MADAGASCAR, vente le 28 mars à l’hôtel Dassault, Artcurial, 7, rond-point des Champs-Élysées, 75008 Paris. Exposition : les 25, 26 et 27 mars 11h-19h, le 28 mars 11h-18h, tél. 01 42 99 20 20, www.artcurial.com 

SÉQUENCE 1, vente le 28 avril à l’hôtel Dassault, Artcurial, même adresse. Les dates d’exposition ne sont pas déterminées à ce jour.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°343 du 18 mars 2011, avec le titre suivant : Une brique dans la mare

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