Un tour des galeries : Paris

Par Le Journal des Arts · Le Journal des Arts

Le 1 mai 1994 - 697 mots

On a pu voir récemment au musée de Nantes des séries de dessins de Tony Cragg, à la fois esquisses et œuvres achevées, dans le sens classique du terme.

Il présente à la galerie Crousel Robelin-Bama (40, rue Quincampoix, du 5 mai au 2 juillet) des sculptures récentes. Tony Cragg a conservé intacte sa capacité à créer des volumes à la fois séduisants et dérangeants, partagés entre une dimension organique et une dimension mécanique. Il reste le leader incontesté de la déjà ancienne "nouvelle sculpture anglaise", dont la vitalité ne se dément pas depuis plus de dix ans. Pierre Weiss est un autrichien de Paris qui s’est d’abord consacré à la peinture avant d’évoluer vers des installations plus complexes, qui intègrent parfois des peintures. Son univers, volontiers sombre, est empreint d’une certaine violence : les matériaux, comme l’acier ou le cortène, auxquels Weiss attache une grande importance, en sont les principaux vecteurs. On verra à la galerie Claudine Papillon (59, rue de Turenne, jusqu’au 4 juin) une installation au titre énigmatique de4 x Chambre.

Comme un certain nombre d’artistes de sa génération, Philippe Ramette a fait ses premières armes lors des Ateliers périodiquement organisé par l’ARC au Musée d’art moderne de la ville de Paris. Ses dispositifs absurdes ont un faux air de machines utilitaires qui impliquent de très près le corps, comme ces paratonnerres portatifs en cuivre. La galerie Météo (4, rue Saint Nicolas, jusqu’au 14 mai) lèvera le voile sur ses dernières inventions. Quelques jours encore pour découvrir les photographies de Jean-Luc Moulène (galerie Anne de Villepoix, 11 rue des Tournelles, jusqu’au 7 mai) dans une première exposition personnelle. Le caractère absurde qui s’y fait jour n’est pas le fruit de manipulations, comme chez Ramette, mais surgit d’un simple constat de la réalité. Lucas Lhermitte (à la galerie Arnaud Lefebvre, 30, rue Mazarine, du 7 au 31 mai) est un artiste de la même génération apparue il y a quelques années. La première Biennale franco-française de Lyon lui avait dédié une salle où l’on avait découvert une installation d’inspiration postminimaliste.

On ignore encore tout du travail de Frère Marc, que présente pour la première fois la galerie Froment-Putman (33, rue Charlot, du 19 mai au 23 juillet). Moine à l’abbaye de la Pierre-qui-vire, en Bourgogne, il crée à partir d’objets de récupération une œuvre qui se veut comme un "cloître rayonnant" et qui n’est pas contraire, semble-t-il, aux vœux qu’il a prononcés devant Dieu et les hommes. Maurice Lemaître, lui, est un vieux moine-soldat du lettrisme qui a trouvé à la galerie de Paris (6, rue du Pont-de-Lodi, du 12 mai au 11 juin), l’atmosphère propice à ses anathèmes répétés contre le monde entier. Deux peintres enfin, Niele Toroni (galerie Yvon Lambert, 108, rue Vieille-du-Temple, du 4 mai au 30 juin) qui – nul n’ignore plus sa loi depuis l’époque BMPT – dispose des empreintes de pinceaux à intervalles réguliers sur divers supports. La constance de l’artiste n’est pourtant qu’un aspect accessoire d’une œuvre qui reste décidément mystérieuse. Il faudra la considérer un jour le regard libre et en oubliant tout l’attirail des historiens formalistes qui lui ont attribué un carcan injustifié. Pierre Antoniucci présente à la galerie Barbier-Beltz (7-8, rue Pecquay, du 5 au 28 mai) une peinture d’un genre beaucoup plus traditionnel. Quelque peu occultée par les effets de modes, en effet trop voyants, du supposé "retour à la figuration", son œuvre a elle aussi, mais d’une manière bien plus intime, le mérite de l’obstination.

Les galeristes ont la bougeotte et cherchent à quitter, au moins provisoirement, leurs échoppes. Comme à Bruxelles récemment, trois galeries parisiennes (Air de Paris, Météo, Rizzo) et trois autres de Francfort, Bruxelles et Londres (Martina Detterer, Etienne Ficheroulle et Laure Genillard) prennent leurs quartiers d’été dans une "résidence secondaire". Un immeuble récemment rénové de la Bastille, et qui attend d’être commercialisé (le Carré Saint-Nicolas, 10, rue Saint Nicolas), leur est confié, du 27 mai au 26 juin, pour y présenter près de quarante artistes, dont un bon nombre de débutants. On y verra aussi des artistes aussi confirmés que Ludger Gerdes, Jef Geys, Rodney Graham, Fabrice Hybert, Philippe Parreno ou Herman Pitz, ainsi qu’un choix d’œuvres sur papier.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°3 du 1 mai 1994, avec le titre suivant : Un tour des galeries : Paris

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