Un prestigieux trio

Canaletto, Delacroix et... Baudelaire.

Par Éric Tariant · Le Journal des Arts

Le 9 mai 1998 - 547 mots

Avis de beau temps, en juin, pour le marché du tableau ancien, avec la vente de trois chefs-d’œuvre : un Canaletto , un grand Delacroix et un La Tour (lire p. 33). Autre temps fort, la mise aux enchères d’un exemplaire des premières épreuves complètes de l’édition originale des Fleurs du Mal.

PARIS - Honoré par un foisonnement d’expositions à l’occasion du bicentenaire de sa naissance, Eugène Delacroix le sera aussi à Drouot le 19 juin : le groupe Piasa mettra en vente Choc de cavaliers arabes. De belles dimensions (80,5 x 100,5 cm), il est estimé 8 à 12 millions de francs.

Cette toile a été peinte en 1833-1834, au retour du voyage au Maroc où le peintre accompagnait une mission diplomatique conduite par le comte Charles de Mornay. Dans une lettre écrite en mai 1839, Delacroix apportait quelques explications sur l’exécution du tableau : “Dans leurs évolutions militaires, qui consistent à lancer leurs chevaux de toute leur vitesse et à les arrêter subitement après avoir tiré leur coup de fusil, il arrive souvent que les chevaux emportent leurs cavaliers et se battent entre eux quand ils se rencontrent. C’est la situation des deux figures principales du tableau”.

Le collectionneur Salomon Goldschmidt – qui a possédé jusqu’à dix Delacroix, dont L’En­lèvement de Rébecca, aujourd’hui au Metropolitan à New York – a fait l’acquisition de ce tableau plein de fougue dans les années 1840. Il existe une deuxième version de Choc de cavaliers arabes, qui se trouve à la Walters Art Gallery de Baltimore. Le même jour, Piasa mettra également aux enchères quatre peintures exécutées par Delacroix en 1821, représentant les quatre saisons, ainsi qu’une aquarelle, Selbitz blessé, et une huile de 1835, Portrait de Félix Guillemardet.

Le mois de juin se poursuivra en beauté, le 25 juin à l’Espace Tajan, avec la vente d’un Canaletto, Vue du môle depuis le bassin de San Marco, estimé 12 à 15 millions de francs. “Le tableau, daté des années 1750, est dans un état excellent de conservation, explique l’expert Éric Turquin. Nous avons eu la chance, depuis dix ans, de voir apparaître sur le marché trois ou quatre Canaletto et Guardi exceptionnels qui ont tiré le marché vers le haut”. Cette composition, l’une des plus célèbres de l’artiste, avait été achetée par le poète William Cooper. La toile a été redécouverte et publiée pour la première fois en 1976. Le même angle de vue a été utilisé fréquemment par Antonio Canal, avec de nombreuses variantes, dont la plus célèbre est le Retour du Bucentaure, le jour de l’Ascen­sion, adjugé 72 millions de francs par Me Tajan en décembre 1993.

“Les Fleurs du Mal”
Peinture mais aussi poésie, avec la mise en vente le 17 juin, à Richelieu Drouot, par Mes Laurin, Guilloux, Buffetaud, d’un précieux exemplaire des premières épreuves complètes de l’édition originale des Fleurs du Mal, estimé 3 millions de francs. Daté de 1857, cet exemplaire de l’éditeur et ami de Baudelaire, Au­guste Poulet-Malassis, comporte d’importantes corrections de la main du poète : typographie, ponctuation, rectification de termes, vers modifiés... Seront encore proposés, lors de la même vacation, des éditions originales (Nerval, Dostoïevski, Tolstoï, Lautréamont), des livres illustrés modernes (Faust illustré par Delacroix, Verlaine illustré par Bonnard...), ainsi que des manuscrits, des lettres autographes et de très riches reliures.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°60 du 9 mai 1998, avec le titre suivant : Un prestigieux trio

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