Art contemporain

Première

Tout l’univers d’Hyber

Par Henri-François Debailleux · Le Journal des Arts

Le 9 avril 2014 - 760 mots

Pour son entrée à la galerie Nathalie Obadia, Fabrice Hyber présente une importante exposition d’œuvres inédites pour la plupart reliées au monde de l’enfance.

PARIS - Fabrice Hyber (né en 1961) est toujours resté un grand enfant. Mais avant, quand il était plus jeune, il faisait des œuvres en grand. Maintenant qu’il a grandi, il les fait en plus petit. Histoire de les penser aussi pour les enfants. Il a d’ailleurs intitulé, comme un pied de nez, cette première exposition chez Nathalie Obadia (la galerie Jérôme de Noirmont, chez qui il était précédemment, ayant fermé l’an dernier), « Interdit aux enfants », lesquels, comme on le sait, ne sont jamais plus attirés que lorsque c’est défendu. « Et puis, précise l’artiste, comme cela les enfants viennent forcément accompagnés de leurs parents. »

POF en version réduite
Au centre de la galerie, Hyber a installé un immense socle. Ou une estrade, ou une aire de jeux, sur laquelle sont disposés ses fameux « POF », ces Prototypes d’Objets en Fonctionnement, dont les premiers datent de 1991 et qu’il a toujours définis comme des objets non fonctionnels destinés à susciter des attitudes, des situations, des comportements différents pour nous faire voir le monde sous d’autres angles. À ce jour, 165 ont été réalisés. Mais n’en sont présentés ici qu’une bonne cinquantaine, qu’il a pour la plupart adaptés au monde et à la taille de l’enfance, ce moment où la table arrive au menton. On retrouve donc son fameux Ballon carré mais de dimensions réduites ; son Homme de Bessines mais réalisé en Lego ; deux Anti-urinoir mais à hauteur de zizis, l’un en éponge, l’autre en faïence de métro ; un Parapluie Tétine, pour éviter de se faire piquer par les baleines ; un Homme Éponge (plus il pleut, plus le costume est lourd) ; l’hilarant String d’épaule ; la Triple balance à l’équilibre difficile à trouver avec une troisième proposition pour rappeler que tout ne peut se résumer au clivage bleu et rose, bien et mal, oui et non. Car, derrière le côté ludique, absurde, poétique de tous ces objets, le jeu rejoint des domaines de réflexion très sérieux. L’installation est « un paysage de moi, de mon univers, une chambre de l’enfant bricoleur que j’étais », indique l’artiste.

L’univers d’Hyber se voit résumé dès l’entrée de la galerie avec un mur de petits tableaux, regroupés sous le titre « Hieros », qui reprennent chacun les images, formes, signes iconiques récurrents dans son œuvre. Ainsi ce tondo où « 0 0 0 » fait une tête à Toto, qui s’ajoute au fameux « 1 – 1 = 2 », suivis de la chaussette réversible, de la voiture au double avant, de la perspective qui devient un cul-de-sac, de la pomme qui perd sa couleur en tombant, etc. Il y en a 27, pour l’instant, dans ce répertoire à lire comme le début de « L’encyclopédie raisonnée », qui au final devrait compter une trentaine de volumes, en 12 parties constituées des milliers d’images prises parmi les 17 000 qu’il a déjà réalisées.

Du réseau au rhizome
Car Hyber est prolifique, il a même fait de la prolifération, du réseau, du rhizome, de l’hybridation, de l’arborescence, de l’écho, le principe de sa démarche. L’arbre d’ailleurs est très présent dans les œuvres ici rassemblées, toutes inédites, à l’exception de la Peinture homéopathique no 30 présentée lors de son exposition monographique à la Fondation Maeght (fin 2012-début 2013) et qui constitue le point de départ de l’ exposition. On retrouve l’arbre ici ou là dessiné à même le mur en prolongement des tableaux ou dans les tableaux eux-mêmes, dont certains ne sont peints que jusqu’à une certaine hauteur, celle qui correspond à la taille d’Hyber le bras levé. Une façon de rappeler l’enfant hissé sur la pointe des pieds pour tenter d’atteindre des hauteurs… ou de laisser de la marge aux ramifications de l’imaginaire.

De la marge, il y en a aussi dans ses prix qui oscillent entre 5 500 euros pour un petit POF Double Mask à 280 000 euros pour la Peinture homéopathique. Soit un très grand écart qui s’explique par la taille de la toile (302 x 480 cm) et par le fait qu’Hyber ne réalise qu’une peinture homéopathique par an. Pas donné quand même. En revanche, les petites toiles à 13 000 euros paraissent plus raisonnables, qui plus est pour l’un des plus importants artistes de sa génération en France dont l’œuvre est protéiforme, tentaculaire, foisonnante.

HYBER

Nombre d’œuvres : 82
Prix : entre 5 500 et 280 000 €

Fabrice Hyber, « Interdit aux enfants »

Jusqu’au 13 mai, galerie Nathalie Obadia, 18, rue du Bourg-Tibourg, 75004 Paris, tél. 01 53 01 99 76
www galerie-obadia.com
du lundi au samedi 11h-19h

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°411 du 11 avril 2014, avec le titre suivant : Tout l’univers d’Hyber

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