entretien

Thierry de Lachaise, directeur du département d’orfèvrerie de Sotheby’s France

Par Armelle Malvoisin · Le Journal des Arts

Le 19 juillet 2007 - 652 mots

« L’orfèvrerie, un domaine de prédilection en France ».

 Comment êtes-vous arrivé chez Sotheby’s ?
J’ai quitté Christie’s en mai 2000 après 10 ans d’expertise dans l’orfèvrerie car j’envisageais de devenir expert indépendant et m’installer à Lyon, ma ville d’origine. Après la disparition de Kobus du Plessis, spécialiste en argenterie de Sotheby’s, j’ai été contacté par la maison de ventes. J’ai alors accepté de revenir dans le giron des salles de ventes parce que l’ouverture du marché français des ventes volontaires laissait miroiter d’intéressantes perspectives.

Quelles perspectives ?
Cela a été reconnu tout de suite : l’orfèvrerie est un domaine de prédilection en France, et pas seulement pour les pièces françaises, mais aussi pour toute l’argenterie européenne, à l’exception de l’argenterie anglaise et allemande, habituellement vendue à Londres.

Sotheby’s est leader dans ce domaine en France. Comment expliquez-vous cela ?
Sotheby’s a une tradition dans l’argenterie que n’a pas Christie’s. Les plus grandes collections telles Jourdan-Barry, Lopez-Willshaw ou Ortiz-Patiño ont été dispersées chez Sotheby’s au cours des années 1990. Et nous avons enregistré tous les records du monde en matière d’argenterie européenne. Le record absolu pour une pièce d’argenterie appartient à une terrine réalisée par Thomas Germain en 1733 et adjugée 10,2 millions de dollars [7,7 millions d’euros] le 13 novembre 1996 à New York. En France, à part nous, aucune maison de ventes ne réalise des ventes régulières entièrement consacrées à l’argenterie. À Drouot, comme dans les salles de province, ces vacations sont toujours couplées à une vente de bijoux. C’est une vieille tradition française que je ne comprends pas bien, d’autant plus que la clientèle n’est pas la même.

Comment s’organisent vos ventes ?
Nous organisons deux ventes annuelles de prestige de la spécialité à Paris avec environ 150 lots d’argenterie européenne par catalogue. 60 % de nos acheteurs sont français. J’accorde un soin particulier à la documentation et à la rédaction des notices du catalogue, car j’estime que nous avons un rôle éducatif à jouer. En principe, on ne prend pas d’objet à moins de 1 000 euros (cela fait partie de la politique haut de gamme de la maison). Le revers de la médaille : le prix de départ freine les jeunes collectionneurs aux moyens modestes.

En 2006, vous n’avez réalisé qu’une seule vente à Paris. Est-ce un signe d’essoufflement du marché ?
Le marché de l’argenterie est de toute façon un marché restreint. L’année 2006 a effectivement été moins bonne (604 200 euros en une seule vente contre 2,5 millions d’euros en 2005). Mais dans le même temps, nous avons beaucoup exporté de pièces russes et anglaises vers les marchés anglo-saxons.

Que prévoyez-vous pour 2007 ?
Nous avons décidé d’exposer l’argenterie avec le mobilier. Il y a de toute évidence une convergence entre ces deux domaines en terme de clientèle, mais pas au point de les mélanger au sein d’une même vente. Car nos ventes d’argenterie sont de haut niveau et justifient un catalogue à part. J’y tiens.

Quid de votre prochaine vente qui se déroulera à Paris ?
La prochaine vente du 28 mars comprend deux sessions. Celle du matin sera dominée par une collection originale de plus de deux cents boucles de ceintures Art nouveau et Art déco regroupées en quatre-vingts lots estimés entre 1 000 et 3 000 euros. Certaines sont signées Tiffany ou Puiforcat. Dans la même fourchette d’estimation, je présente également cent quarante dessins de Jean Puiforcat des années 1940, vendus en vingt-quatre lots. Les dessins d’orfèvre sont rares et j’espère qu’ils susciteront l’intérêt au moment du salon du dessin. Le lot-phare de la vente de l’après-midi est une magnifique et rare aiguière de Quimper en argent et vermeil, vers 1580, aux armes d’alliance de la famille Honoré, qui donna plusieurs conseillers à la Chambre des Comptes de Bretagne. Elle est estimée 50 000 à 80 000 euros. À l’exception de coupes connues, c’est la pièce civile bretonne la plus ancienne que l’on ait jamais vue.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°254 du 2 mars 2007, avec le titre suivant : Thierry de Lachaise, directeur du département d’orfèvrerie de Sotheby’s France

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