Profession antiquaire : état des lieux

Suisse : victimes de leurs puissants voisins

Le Journal des Arts

Le 1 novembre 1994 - 339 mots

Il est impossible, en Suisse, de comparer la situation des antiquaires à celle des marchands d’art moderne (lire le JdA n°6 d’octobre). Plusieurs de ces derniers jouissent d’un prestige international et l’ensemble de la profession fait preuve d’un dynamisme remarquable. La situation des antiquaires est moins brillante.

GENÈVE - Le comportement de l’amateur d’art helvétique explique en partie ce décalage. Certaines des plus grandes collections d’art du XXe siècle se trouvent en Suisse, mais leurs promoteurs ont toujours été plus attirés par les arts plastiques, que par les arts décoratifs. Une forme de snobisme intellectuel voulait que, chez les collectionneurs les plus qualifiés et les plus prospères, on fasse voisiner les Picasso cubistes avec un mobilier extrêmement banal.

D’autre part, les saines vertus du traditionnel mobilier suisse, que ce soit les armoires peintes paysannes ou les copies provinciales des ébénistes parisiens, donnaient à leurs acquéreurs un certificat de respectabilité au-dessus de tout soupçon.

La réalité du marché est l’illustration de cet état de fait. Les deux foires les plus importantes d’antiquaires, le Kam à Zurich et le Salon de Lausanne, sont à la périphérie des grandes foires, biennales ou salons européens. Certes, Iseli à Zurich et la Vieille Fontaine à Lausanne sont d’excellents antiquaires spécialisés dans le mobilier français, Segal à Bâle est l’un des meilleurs spécialistes européens de porcelaine et d’argenterie, la galerie Knöll à Genève est une très belle vitrine de bronze anciens, et Koetser à Zurich compte parmi les grands spécialistes de la peinture flamande, mais ce sont plus des exceptions que des exemples tirés d’un large échantillonnage.

Les ventes aux enchères tirent, d’une certaine manière, mieux leur épingle du jeu. Après des années difficiles, Koller a eu une série de très bonnes ventes ; les ventes spécialisées de Sotheby’s à Zurich attirent un large public de personnes privées, mais le fait marquant est que le Suisse achète, dans la grande majorité des cas, auprès des antiquaires français, anglais, italiens ou allemands, pénalisant ainsi encore plus une corporation qui a déjà beaucoup de mal à s’imposer.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°8 du 1 novembre 1994, avec le titre suivant : Suisse : victimes de leurs puissants voisins

Tous les articles dans Marché

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque