Artissima

Slow business

La foire turinoise a souffert de la crise économique italienne

Par Roxana Azimi · Le Journal des Arts

Le 17 novembre 2010 - 526 mots

TURIN - Qualité ne rime pas avec marché. Telle est la triste équation qui ressort de la dernière édition de la foire Artissima, qui s’est tenue du 5 au 7 novembre à Turin.

La qualité toujours remarquable est même montée d’un cran grâce à la section « Back to the Future » lancée par son nouveau directeur, Francesco Manacorda. Une plateforme dédiée à des créateurs comme Gil. J. Wolman ou Antoni Miralda, dont on s’étonne qu’ils soient méconnus tant leur acuité et leur fraîcheur sautent aux yeux. « Cela met tout le reste en perspective. La plupart des gens pensaient qu’il s’agissait du travail de jeunes artistes. Je leur dis que ce sont bien des jeunes artistes qui ont fait ça, même si c’était il y a quarante ans », confiait Carlos Duran, directeur de Senda (Barcelone), laquelle montrait Miralda. Bien que les prix des œuvres de ces artistes soient anormalement bas par rapport à leur importance historique, exception faite des tarifs faramineux pratiqués par Michael Janssen (Berlin) pour Gianfranco Baruchello, le commerce fut quasiment inexistant dans cette section. 

Portefeuille allégé 
Les affaires furent tout aussi ardues sur le reste du salon. « Cela devrait pourtant être un paradis pour les collectionneurs. Dans n’importe quelle autre foire, les gens se précipitent compulsivement les deux premières heures. Ici, les œuvres restent disponibles plus longtemps. Le problème, c’est qu’Artissima est la dernière foire de la saison, les collectionneurs ont déjà été au moins à deux autres foires avant, et ils arrivent à Turin avec un portefeuille allégé », indiquait Claudia Cargnel, de la galerie Budaga & Cargnel (Paris). Les Italiens disposent de beaucoup moins de cash qu’avant, tandis que les PME locales ressentent la crise de plein fouet. Les institutions sont elles-mêmes désargentées [lire p. 8]. Le FRAC [Fonds régional d’art contemporain] Piémont n’a pu procéder cette année à aucun achat. Faute de moyens, le Castello di Rivoli a dû reporter une exposition « John McCracken » qui devait avoir lieu en novembre. Le musée a néanmoins acquis sur la foire une pièce de Dorothy Iannone chez Air de Paris (Paris) et un triptyque d’Anna Maria Maiolino chez Raffaella Cortese (Milan). Le Galleria Civica d’Arte Moderna e Contemporanea (GAM) eut, lui, le bon goût d’emporter une installation de Mark Dion chez In Situ (Paris).
Malgré l’ambiance poussive, certains comme Balice Hertling (Paris) ou Ben Kaufmann (Berlin) ont tiré leur épingle du jeu. The Hotel (Londres), qui s’était tourné les pouces à la Foire internationale d’art contemporain (FIAC, Paris), a vendu sur photo l’intégralité de son stand parisien à Turin. De son côté, Frank Elbaz (Paris) a cédé deux sculptures de Gyan Panchal à l’Américain Tony Podesta, ainsi qu’une petite œuvre de Davide Balula à John Elkann, le président de Fiat. Chantal Crousel (Paris) s’est défait de douze pièces de Clément Rodzielski, tout en finalisant avec la Fondation Sandretto Re Rebaudengo la vente de la grande sculpture de Thomas Hirschhorn qu’elle montrait à la FIAC. « Les Italiens peuvent acheter dans six mois ou un an ce qu’on leur montre maintenant, expliquait Niklas Svennung, de la galerie Crousel. C’est du «slow business», comme il y a du «slow food». »

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°335 du 19 novembre 2010, avec le titre suivant : Slow business

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