Entretien

Rodolphe Janssen, galeriste à Bruxelles

Par Roxana Azimi · Le Journal des Arts

Le 13 avril 2010 - 740 mots

« Les gens sont à nouveau prêts à acheter ».

L’installation, à Bruxelles, des galeries Barbara Gladstone (New York), Nathalie Obadia et Almine Rech (Paris) a-t-elle eu une incidence sur votre activité ?
Ces galeries ont plus apporté en termes d’image que de business. Certaines personnes qu’on ne voyait pas, comme le curateur Francesco Bonami, sont venues spécialement pour leurs vernissages. Bruxelles est devenue une ville que les gens prennent plus au sérieux. Mais je n’ai pas remarqué le déplacement des plus grands collectionneurs du monde entier. Néanmoins, pour les Flamands, il est clair que Bruxelles est la première place en Belgique pour l’art contemporain. Il y a encore quelques années, c’était Anvers qui affichait une image dynamique, avec la mode et la présence des galeries Micheline Szwajcer et Zeno X. Mais Micheline a fermé l’an dernier et Zeno X travaille peu avec le marché belge.

Par le passé, d’autres galeries avaient tenté l’aventure belge, comme la Galerie de France, Ghislaine Hussenot ou Yvon Lambert avant de fermer. Les nouvelles venues vont-elles rester ?
Les autres galeries étaient venues en période de crise. C’était alors une tentative désespérée de se créer un nouveau marché alors que plus rien ne se passait chez elles. Celles qui sont arrivées depuis deux ans ont pris la décision de se développer et d’offrir une plus grande visibilité à leurs artistes en plein boom. Elles participaient à l’élan généralisé qui consistait à avoir des satellites dans plusieurs pays. Elles resteront à Bruxelles tant que cela leur apportera une énergie, ainsi qu’à leurs artistes.

Dans sa liste, Barbara Gladstone possède l’artiste Banks Violette que vous représentez aussi. Est-ce un problème pour vous ?
Gladstone n’est pas la galerie principale de Banks Violette à New York, qui est Team Gallery. Elle s’occupe de Banks pour les grandes installations et lui permet d’atteindre des collectionneurs qui ne vont pas forcément dans une jeune galerie comme Team. Moi, j’ai organisé son exposition au Museum Dhondt-Dhaenens à Deurle (Belgique). Barbara n’a aucune velléité de faire quoi que ce soit à Bruxelles avec Banks, elle n’en a pas l’espace.

Le marché belge est-il facile à percer pour ces galeries ?
Dans tous les marchés, il existe plusieurs strates : une pointe avec une dizaine de collectionneurs, puis un centre avec une centaine d’amateurs. Des gens comme Gladstone essayent d’atteindre la pointe de la pyramide. Des galeries installées depuis longtemps en Belgique, comme nous, touchent également toute une série de collectionneurs qui n’achètent peut-être pas de manière avide et compulsive, mais à qui nous vendons une fois par an.

Comment s’est porté le marché belge en 2009 ?
Nous avons personnellement connu une baisse de 12 % par rapport à 2008, qui avait été une année formidable, avec notamment l’exposition de Farhad Moshiri. Entre novembre 2008 et mars 2009, c’était calme, mais à partir de [la foire] Art Brussels, nous avons senti que les gens étaient à nouveau prêts à acheter. J’ai fait des efforts pour obtenir des pièces importantes. Les marchands américains de certains de mes artistes ne vendaient plus depuis un certain temps, et j’ai eu accès à des œuvres qui, autrement, seraient parties par d’autres canaux. Ce qui nous a sauvés aussi, c’est que nous ne nous sommes pas concentrés uniquement sur le haut de la pyramide des collectionneurs, lesquels étaient surchargés de propositions d’achat à la casse.

Les expatriés fiscaux français pèsent-ils dans votre chiffre d’affaires ?
Il existe des collectionneurs parmi les Français qui arrivent à Bruxelles, mais ils ne sont pas majoritaires. C’est bien sûr un plus, mais chez les Français, il y a toujours ce rapport au passé, à l’histoire. Ils ne sont pas forcément passionnés par la jeune création américaine que l’on montre.

Avec votre frère Sébastien, pourquoi avoir ouvert « Sorry we’re closed », une vitrine qui rappelle un peu la Wrong Gallery de Cattelan [lire p. 35] ?
On avait vu la Wrong Gallery, mais c’était juste une porte vitrée, alors que là, c’est quand même un espace d’exposition, même fermé. Nous avons eu l’idée d’un espace low cost, où nous montrons des artistes que nous ne présentons pas à la galerie, sans l’obligation de les prendre par la suite dans notre liste. Nous avons ainsi montré Michael Sailstorfer, Martin Creed et Jonathan Meese. Nous avions présenté Kendell Geers en 2007, et nous n’organisons que maintenant son exposition personnelle à la galerie.

Galerie Rodolphe Janssen, 35, rue de Livourne, 1050 Bruxelles, tél. 32 2 538 08 18
 www.galerierodolphejanssen.com

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°323 du 16 avril 2010, avec le titre suivant : Rodolphe Janssen, galeriste à Bruxelles

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