Pour qui sonne le glas

Dispersion de la collection Vitale

Le Journal des Arts

Le 1 janvier 1997 - 527 mots

Christie’s a su mener une très habile opération de marketing pour la dispersion de la \"collection\" Vitale de pendules et d’horloges, en dépit des poursuites engagées contre le vendeur, soupçonné de détournement de fonds.

LONDRES (de notre corres­pon­dante) - Les 282 pendules et horloges de la collection Vitale ont été vendues en partie à New York et en partie à Londres, les 30 octobre et 26 novembre, pour un montant total de 4,36 millions de livres (35,8 millions de francs). Toujours à la recherche des "pièces les plus belles et les plus rares, créées par les artisans les plus importants de leur temps", Vitale a constitué sa collection en moins de huit ans, achetant la moitié de ses pièces chez le marchand zurichois Richard Red­ding. Mais peu de collectionneurs particuliers se seront doutés qu’ils avaient à faire au premier "marchand" de pendules d’Amé­rique, contraint de liquider tout son stock.

En effet, la vente a été organisée rapidement après l’annonce, le 17 mai 1996, que Vitale – jusqu’alors vice-président du développement et des relations avec les entreprises chez Engelhard, une entreprise spécialisée dans l’industrie chimique et l’ingénierie – était licencié pour détournement de fonds. Il porterait sur des sommes équivalant à 65 millions de francs, et des poursuites ont été engagées à l’encontre du collectionneur.

Restaurations excessives
La collection a été dispersée entre Londres et New York, les pièces les plus spectaculaires et les plus décoratives étant réservées aux acheteurs américains. À New York, cinq des lots les plus remarquables sont allés à des collectionneurs particuliers, tandis que la vacation à Londres a surtout concerné les professionnels. Selon Richard Redding, Vitale a réalisé un bénéfice variant entre 30 et 100 % sur de nombreuses pendules d’origine française. Ainsi, une pendule musicale universelle et géographique d’époque Charles X, montée sur bronze doré, a atteint 266 500 dollars (1,4 million de francs), soit le double de ce que Vitale l’avait payée à Redding deux ans auparavant.

Le fait que les pendules aient été très restaurées n’a pas arrêté les collectionneurs américains. Un régulateur astronomique mensuel à gaine d’époque Louis XVI, monté sur bronze doré, pourtant décrit comme "endommagé par une restauration excessive", a doublé son estimation à 431 400 dollars (2,2 millions de francs), soit le prix le plus élevé de la vente. Parmi les autres lots qui ont retenu l’attention, une horloge à gaine de George Graham, accompagnée du seul reçu de la main de cet artisan qui nous soit parvenu, partie à 145 500 dollars (760 000 francs). De même, l’une des rares pendules françaises qui n’ait pas été trop retouchée, un régulateur mensuel de bureau d’époque Empire, en acajou monté sur bronze doré, dû à J.-J. Lepaute, a doublé son estimation : il a été enlevé à 117 000 livres (960 000 francs) par Philip Whyte, un marchand londonien.

Tout n’a cependant pas trouvé aussi facilement preneur. Ainsi, une spectaculaire horloge d’applique en ébène de Thomas Tompion n’a atteint qu’un prix décevant, 55 000 livres (450 000 francs), tandis qu’une autre horloge d’applique, une chinoiserie laquée d’époque George II dont la gaine avait été trop nettoyée, partait pour la moitié de sa modeste estimation de 4 000 livres.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°32 du 1 janvier 1997, avec le titre suivant : Pour qui sonne le glas

Tous les articles dans Marché

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque