Ventes aux enchères

Peinture ancienne : Sotheby’s donne le « La » à New York

Par Marie Potard · Le Journal des Arts

Le 15 février 2018 - 874 mots

NEW YORK / ETATS-UNIS

Avec une offre plus importante, de bons tableaux et des estimations plutôt raisonnables, Sotheby’s, désormais seule en scène en ce début d’année, envoie un signal positif au marché.

Pour la troisième année consécutive, Sotheby’s a maintenu ses ventes de peinture ancienne en ce début d’année à New York. Christie’s, elle, les a décalées en avril et n’a conservé que sa vente de dessins anciens.

Contrairement à l’an passé, Sotheby’s ne disposait pas d’une mais de deux ventes phares qui lui ont permis de récolter 54,6 millions de dollars (51 M€), effectuant un bond de 100 % par rapport à 2017. La saison a débuté le 31 janvier par la dispersion du stock du marchand new-yorkais Otto Naumann dont le bail de la galerie est arrivé à échéance. Pour cette vente, la maison a engrangé 6,2 millions de dollars (5,8 M€), un chiffre proche de son estimation haute. « Cette vente, qui semble avoir bien marché est un peu une illusion car Sotheby’s avait mis des estimations très basses et a vendu à la casse. Le marchand a joué le jeu mais n’a pas dû gagner grand-chose vu les prix auxquels il avait acheté ces œuvres », a commenté Nicolas Joly, expert en peinture ancienne qui avait fait le déplacement à New York.

Par exemple, Un Saint Jérôme en prière, adjugé 130 000 dollars au marteau (estimation 150 000 à 200 000 $) avait été acheté en 2009 pour un montant de 250 000 dollars au marteau. Vénus, Cupidon et Pan, tableau de Giovanni Bilivert (1585-1644), adjugé 879 000 dollars (est. 300 000 à 500 000 $) – un record mondial pour l’artiste –, est l’adjudication la plus élevée de la vacation. Là encore, la marge est faible pour le marchand, qui l’avait acquise chez Sotheby’s Londres en 2012 pour 844 252 dollars.

En deuxième position, Le Vieil Homme de Castille, par Joaquín Sorolla y Bastida, a trouvé acquéreur à 627 000 dollars (est. 200 000 à 300 000 $), une bonne surprise. Pour le reste, 9 œuvres sur les 39 proposées à la vente – des tableaux estimés en dessous de 150 000 dollars – sont restées sur le carreau. « Globalement, les marchands présents dans la salle n’ont pas enchéri. Il faut dire que les tableaux étaient connus du marché et qu’ils avaient été achetés très cher ces dix dernières années en ventes publiques. Ce sont surtout des collectionneurs privés qui se sont portés acquéreurs », a confié Nicolas Joly.

La Renaissance plébiscitée
Le lendemain, 1er février, Sotheby’s organisait sa traditionnelle vente du soir. Estimé 38,6 à 55 millions de dollars, son produit a atteint 48,4 millions de dollars (45,2 M€), montant proche de son estimation basse. L’an passé, la vente n’avait totalisé que 27,2 millions de dollars, mais comportait 20 lots de moins. Les marchands n’ont pas été très actifs dans la salle, mis à part Johnny Van Haeften – le marchand londonien spécialisé dans la peinture hollandaise et flamande des XVIe et XVIIe siècles –, qui a acquis La Charité romaine, de Willem Drost (1633-1659), pour 1 million de dollars (est. 200 000 à 300 000 $). En vedette, c’est une paire de Vues de Venise de Canaletto qui s’est vendue 4,1 millions de dollars (est. 3 à 4 M$), suivie du Portrait de Monseigneur Segni, majordome du Pape Innocent X, peint par Vélasquez et Neri, adjugé 4 millions de dollars (est. 3 à 4 M$).

Avec cette première session de l’année dans la discipline, plusieurs tendances se dessinent. D’abord, les tableaux de la Renaissance italienne, y compris les fonds d’or, ont les faveurs du public, à l’instar de la Vierge à l’Enfant d’Agnolo Gaddi, XIVe siècle, emportée pour 1,4 million de dollars (est. 600 000 $), ou de Saint Jean l’Évangéliste, du Maître de l’Observance, exposé par la galerie Moretti (Londres, Monaco) lors de la foire Tefaf de New York à l’automne dernier et vendu 975 000 dollars (est. 400 000 à 600 000 $). Même engouement pour les caravagesques, à l’image du Christ bénissant de Manfredi, début du XVIe siècle, cédé 675 000 dollars (est. 100 000 à 150 000 $) ; mais aussi de l’école nordique, avec le Portrait de Martin Luther par Cranach adjugé 2,3 millions de dollars (est. 800 000 à 1,2 M$).

Les paysages hollandais du XVIIe boudés
En revanche, les paysages hollandais du XVIIe siècle, passés de mode, ne suscitent guère de batailles d’enchères. Exemple, Paysage d’une rivière boisée avec un village, des bateaux et des personnages, de Brueghel l’Ancien, n’a pas trouvé preneur (est. 2,5 à 2,5 M$). Même constat pour les vedute. En ce qui concerne la peinture française, ses résultats restent honorables. L’Hiver de Nicolas Lancret, XVIIIe siècle, s’est vendu 2,2 millions de dollars au marteau, légèrement au-dessus de son estimation haute (2 M$), mais il enregistre tout de même un record pour l’artiste.

Au final, le marché tient le coup.« Il n’y avait pas de ventes époustouflantes avec un tableau exceptionnel car les maisons de ventes ont de plus en plus de mal à se fournir, mais Sotheby’s a tout de même bien vendu. De toute façon, les bons tableaux se vendent bien », a observé Nicolas Joly.

Toutes les estimations sont indiquées hors frais acheteur tandis que les résultats sont indiqués frais compris.

 

 

 

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°495 du 16 février 2018, avec le titre suivant : Peinture ancienne : Sotheby’s donne le « La » à New York

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