Paysages de laque d’or

Spink dévoile une somptueuse collection de laques Meiji

Le Journal des Arts

Le 13 juin 1997 - 460 mots

Encore jamais vues sur le marché occidental, quarante-sept laques de l’époque Meiji appartenant à un collectionneur japonais sont exposées chez Spink, du 16 au 27 juin. Leur présence à Londres est significative de l’inertie qui caractérise encore ce marché au Japon, et Spink espère intéresser les institutionnels avec ces pièces d’exception.

LONDRES. Le décor surchargé de la plupart de ces laques s’apparente à la conception esthétique Meiji (1868-1912), qui coïncide avec la libération et l’explosion de la culture japonaise, à la réouverture de certains ports aux Occidentaux en 1859. Dans l’introduction du catalogue, Jo Earle montre que ces œuvres rélèvent, tant par la forme que leur somptueux décor, d’une tradition plus ancienne, établie sans doute au début de l’époque d’Edo (1615-1868). Un extraordinaire éventail de techniques est utilisé pour recouvrir de laque d’or chaque centimètre de la surface de ces pièces. Des paysages d’une extrême complexité sont détaillés grâce à un système très sophistiqué de différenciation des motifs et des textures, et aux diverses méthodes d’application de la poudre d’or ou maki-e.

Maison de thé miniature
Beaucoup ont une signification rituelle et font partie d’ensembles traditionnels créés pour les mariages, comme en témoigne le mon, blason réunissant deux familles. Cet aspect apparaît notamment dans un ensemble de laques qui se réfèrent au Dit du Genji (1004), chef-d’œuvre de la littérature classique, dont le premier vers du poème s’inscrit dans un paysage très élaboré. D’autres pièces sont autant d’interprétations de paysages des célèbres rouleaux en soie de la dynastie des Song du Sud. L’un des objets les plus originaux est une boîte à encens en forme de maison de thé miniature – une forme jamais vue ailleurs, selon Christopher Knapton, de chez Spink. Le toit de la maison de thé est rendu de façon admirable par un motif en damier ; le faîte est figuré en argent par un alignement de rondins, et les avancées par de très petits bambous. Un cabinet haut d’environ 1,20 m est lui aussi considéré comme une pièce sans précédent. L’étiquette d’un marchand indique que ce meuble a été conçu pour une exposition internationale à Tokyo vers 1890. Plusieurs maîtres-artisans, ébénistes, laqueurs et serruriers ont collaboré à sa réalisation. Véritable tour de force technique, le meuble répond tout à fait aux attentes du gouvernement de l’époque, qui encourageait la renaissance des métiers d’art à la fin du XIXe siècle. Le cadre est souligné par de délicates incrustations en ivoire, et les montants par des garnitures de métal rehaussées d’or. Quand les portes s’ouvrent, elles révèlent un scintillant paysage de laque dorée, due à l’artiste Yasui Höchö. Chez Spink, on espère que l’apparition d’une pièce aussi exceptionnelle – son prix, 150 000 livres, est le plus élevé de l’exposition – sera suivie d’une acquisition par un musée japonais.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°40 du 13 juin 1997, avec le titre suivant : Paysages de laque d’or

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