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TRANSPORT D’ART

The Packengers simplifie toujours plus le transport d’œuvres d’art

Par Jean-Christophe Castelain · Le Journal des Arts

Le 14 février 2024 - 928 mots

L’algorithme innovant et la logistique de l’entreprise française ont réussi à séduire deux grandes plates-formes américaines.

Paris. Depuis le lancement de son service de cotation d’emballage en 2020, Amaury Chaumet, président-directeur général de The Packengers (groupe ESI Fine Art), poursuit une obsession : faire en sorte que le transport des œuvres d’art achetées sur les plate-formes de ventes aux enchères ou de gré à gré soit aussi transparent qu’il l’est sur Amazon. Il avance à grands pas et a signé des accords avec les leaders du marché : en France avec Interenchères et Drouot.com, aux États-Unis avec les deux géants que sont LiveAuctioneers et Invaluable.com, des références en la matière.

Dans le domaine de la logistique, les solutions les plus simples pour les clients sont souvent les plus complexes à mettre en œuvre. La singularité de The Packengers repose sur son référentiel et son algorithme qui permettent d’établir un devis immédiat de transport à partir d’un minimum d’informations. Historiquement, et encore aujourd’hui pour les maisons de ventes qui n’auraient pas implémenté l’application, l’acheteur indique au transporteur les dimensions, le poids et la nature de l’objet transporté (outre les informations sur les adresses de départ et d’arrivée, et parfois la valeur) pour obtenir un devis qui est établi entre plusieurs heures et plusieurs jours après, en fonction des ressources humaines déployées par le transporteur. Grâce à sa base de données reposant sur les centaines de milliers de transports d’œuvres qu’il a effectués depuis son lancement, et à des algorithmes particuliers, le logiciel de The Packengers est capable d’afficher un devis instantané à partir des seules indications du type d’objet et de son format en deux dimensions. « Aujourd’hui nous pouvons deviner la taille et le poids à 98 % », se félicite Amaury Chaumet.

La logistique amont

La complexité de l’algorithme est liée aux nombreux facteurs à prendre en compte pour établir un devis qui repose sur des coûts réels multiples : transport du point de récupération de l’objet vers une plate-forme d’emballage, nature de l’emballage, choix du transporteur le plus pertinent vers le point de livraison qui peut se situer partout dans le monde, assurance du transport. Encore faut-il offrir des prix compétitifs. C’est ici que l’« ancien monde » prend sa revanche. S’appuyant sur les infrastructures du groupe (lire l’encadré), The Packengers dispose aujourd’hui de quatre nouveaux hubs en régions pour rapatrier et traiter avec ses propres véhicules les objets détenus chez les marchands, et il a signé la construction d’une nouvelle plate-forme dans le Val-d’Oise, à Puiseux-en-France. Aux États-Unis, le groupe dispose de plate-formes à New York et à Los Angeles. Comme Amazon, il veut industrialiser et massifier cette logistique amont afin de réaliser des économies d’échelle. Et plus les adjudicataires feront appel à The Packengers, plus le coût unitaire de récupération et de l’emballage provisoire chez le commissaire-priseur sera diminué. Le modèle est d’autant plus facile à optimiser que l’entreprise possède les camions et les plate-formes, ce qui n’est pas le cas de plusieurs de ses concurrents. La phase « aval », c’est-à-dire de la plate-forme logistique vers la destination finale, est elle réalisée par des sociétés de transport express (DHL, Fedex, UPS…) choisies en fonction de la distance et du moyen de transport pour lesquels elles sont les plus performantes.

Un seul paiement pour le lot et son transport

L’enjeu est maintenant de rendre la plus fluide et simple possible la transaction pour le client final. Le processus habituel pour celui-ci est la demande d’un devis en ligne après avoir été redirigé à partir du site de la maison de ventes. L’intégration plus poussée de The Packengers avec le site marchand (Interenchères, Drouot, Millon..) permet d’afficher automatiquement le prix estimé de la livraison du lot (à modifier en fonction de l’adresse de livraison). L’application de The Packengers se connecte sur le site, récupère les caractéristiques du lot et calcule immédiatement le coût du transport.

Reste qu’aujourd’hui le client paye deux fois : une première fois pour le lot acquis auprès du commissaire-priseur, une deuxième fois pour le transport par The Packengers. L’étape suivante, comme pour Amazon, est de demander un seul réglement au client, pour le lot et son transport, charge au commissaire-priseur ou à la plate-forme de payer The Packengers. C’est cette solution qui est mise en place avec Invaluable.com aux États-Unis.

L’ultime enjeu est de réduire le délai de livraison, qui peut aller jusqu’à une dizaine de jours. Cela passe par une massification des transactions, une procédure bien huilée de récupération des lots chez les commissaires-priseurs, l’ouverture de nouveaux hubs, l’optimisation de l’emballage. C’est tout le paradoxe de ce métier : il conjugue les technologies numériques les plus avancées de l’intelligence artificielle avec les contingences les plus prosaïques. L’entreprise effectue 300 000 transports chaque année et vise le million en 2026. Amaury Chaumet est en train de devenir le Jeff Bezos du transport d’œuvres d’art en volume.

ESI Fine Art en chiffres

Issu du regroupement par acquisitions de plusieurs entreprises de transport, le groupe ESI Fine Art réalise un chiffre d’affaires (CA) de 100 millions d’euros environ (chiffre non confirmé par son président). L’activité de transport pour les foires représente un CA de 25 millions d’euros et celle de déménagement haut de gamme, de 15 millions d’euros. L’activité « art » se décompose en trois types de prestations : le transport d’œuvres pour les musées (15 M€), le transport d’œuvres à la demande de décorateurs (20 M€), et The Packengers (CA non communiqué). Le groupe mutualise les ressources de ces différentes activités qui ont par ailleurs des saisonnalités différentes. Amaury Chaumet a gardé le contrôle de son groupe aux côtés d’investisseurs.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°627 du 16 février 2024, avec le titre suivant : The Packengers simplifie toujours plus le transport d’œuvres d’art

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