Londres, capitale du design

Trois ventes spécialisées animent un marché en hausse

Le Journal des Arts

Le 22 mai 1998 - 692 mots

Christie’s organisera le 3 juin, à South Kensington, la première vente exclusivement consacrée au design italien du XXe siècle. Plusieurs lots importants devraient atteindre 10 à 15 000 livres sterling (100-150 000 francs). Deux autres vacations de design se sont tenues à Londres au mois de mai, sous l’égide de Sotheby’s le 13, et de Bonham’s le 20.

LONDRES - Ces dix dernières années, le marché du design s’est développé à l’initiative d’un groupe d’amateurs enthousiastes, pour devenir aujourd’hui un domaine internationalement reconnu. Le prix des prototypes des grands créateurs a doublé, parfois triplé. À l’approche de la fin du millénaire, les pièces représentatives des décennies les plus récentes suscitent davantage d’intérêt, et les musées du monde entier achètent activement en prévision des grandes expositions à venir. Les objets des années soixante et soixante-dix, bouleversant tous les canons du goût, sont actuellement en vogue. Londres est ainsi devenu un grand centre international pour le design du XXe siècle, l’organisation de vacations régulières contribuant à focaliser l’attention, et la présence de quelques-uns des meilleurs designers au monde a renforcé son autorité.

La décision prise par Christie’s d’organiser le 3 juin une vente de design italien à South Kensington paraît audacieuse. Selon l’expert Simon Andrews, le marché est désormais suffisamment attractif pour connaître un début de spécialisation. Les Italiens, dont les œuvres ont favorisé l’éclosion du design international contemporain à partir des années quarante, sont à l’origine de son développement. Les productions de créateurs aussi radicaux qu’Alessandro Mendini, Gio Ponti, Osvaldo Borsani et Ettore Sottsass sont aujourd’hui parmi les plus recherchées sur le marché.
Certaines n’étant jamais passées en vente publique, il est toutefois difficile d’établir des estimations. Christie’s a vendu l’an dernier un très grand lampadaire d’angle à contrepoids Moloch pour 20 700 livres (207 000 francs), le premier objet de ce type à franchir la barre des 10 000 livres aux enchères. La vacation du 3 juin sera également riche en objets des années soixante inspirés de la culture Pop : un fauteuil-galet réalisé pour le Gruppo 14 – des galets de mousse moulés, maintenus par un treillis métallique – est estimé 7-9 000 livres, et une chaise Capitello, dessinée pour le Studio 65, 2-3 000 livres.

Une clientèle jeune
Deux ventes de design contemporain se sont tenues en mai. Le 13, Sotheby’s a mis à l’honneur quelques œuvres majeures du Finlandais Alvar Aalto, auquel le MoMA de New York consacre une exposition pour son centenaire. Parmi les pièces proposées figuraient un siège en bois courbé du sanatorium de Paimo – très rare sur le marché – et une chaise à haut dossier, une production limitée des années trente. Pour l’avant-garde italienne des années quatre-vingt, deux pièces d’Alessandro Mendini : une chaise en bois et verre miroir, qui s’apparente davantage à une sculpture qu’à un meuble, et un Non-siège, dont la version originale a été détruite par le feu lors d’un happening de 1982. Le 20 mai, Bonham’s dispersait un ensemble de dessins particulièrement intéressants du design italien d’avant-garde, réalisés par le Studio milanais Alchimia, pour lequel Mendini a travaillé. Vers quelles pièces orienter ses achats ? “Il existe une grande différence entre un produit fabriqué en série et un prototype, explique Simon Andrews. Ce dernier est cher et ne peut être acheté que par un musée ou un collectionneur sérieux. Les pièces fabriquées en série, en revanche, ne dépassent généralement pas 2 000 livres et servent réellement de mobilier”. Pour Lydia Creswell-Jones, chez Sotheby’s, “ce genre d’objets correspond bien au style de vie de nos clients, la trentaine aisée, qui habitent dans des lofts”.

Bien que les prix aient beaucoup augmenté ces cinq dernières années, il reste encore intéressant d’acheter. “D’ici dix ans, on ne trouvera plus ce type d’objets”, souligne Simon Andrews. Lydia Creswell-Jones est, elle, plus prudente : “Il est difficile de parler d’investissement. Le marché évolue vite, et nous sommes dans une perspective historique très étroite. Les pièces bon marché ne peuvent être considérées comme un investissement potentiel. Mais les pièces uniques, donc les plus chères, empreintes de l’inspiration de leur créateur et occupant une place importante dans l’histoire internationale du design, ne peuvent que prendre de la valeur”.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°61 du 22 mai 1998, avec le titre suivant : Londres, capitale du design

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