Analyse

Les particuliers plus actifs que les marchands

Par Roxana Azimi · Le Journal des Arts

Le 16 avril 2004 - 492 mots

Faute de trésorerie, les antiquaires sont peu acheteurs en ventes publiques. Ils se réveillent pour les pièces exceptionnelles mais boudent le marché de moyenne gamme.

L’enthousiasme manifesté lors du vernissage de Tefaf Maastricht n’aura pas eu de portée immédiate sur le marché, si ce n’est au Salon du dessin. Après quelques lueurs d’excitation, le train-train est de retour. Appelons un chat un chat, nous sommes dans un climat de crise molle, une de ces crises poisseuses qui, sans vous prendre à la gorge, refrène insidieusement les appétits des marchands et des particuliers. Actifs lors des dispersions Pierre Miquel et Feuardent, les privés se montrent généralement réservés. Au Salon d’Antiquités-Brocante du Vieil-Antibes, malgré la bonne humeur méridionale, le vernissage était plus tiède que d’habitude et les allées un peu trop désertes. Le Pavillon des antiquaires des Tuileries peut se targuer d’une bonne cote de popularité. Ce qui ne rime pas toujours avec un allant commercial. Côté marchands, l’attentisme fait loi. Un brin désabusés, peu d’antiquaires ont déjà trouvé l’objet rare pour le Carré Rive Gauche. Tout juste songent-ils à la Biennale des antiquaires de septembre. Une Biennale peu « communicative », du moins avec la presse française, mais apparemment moins « exclusive » que lors de la dernière cuvée. Gérard Orts, Philippe Delpierre et Jean-François Anne, trois marchands déboutés de la précédente édition, ont d’ailleurs engagé le 7 avril un procès contre le Syndicat national des antiquaires, espérant ainsi clarifier les procédures d’admission.
Faute de trésorerie suffisante et de transactions régulières, les antiquaires sont peu acheteurs, sauf pour des œuvres exceptionnelles. Leur immobilisme bouleverse les prix en ventes publiques pour les pièces de qualité moyenne. Dans certains cas, les enchères de la vente Miquel auraient pu être dopées si les marchands s’étaient montrés plus engageants. La possibilité des aftersales conforte d’ailleurs cette position en retrait. Malgré la frilosité générale, et à contre-courant de certains spécialistes, quelques professionnels peuvent lâcher du lest et batailler ferme pour leur intuition. Tel est le cas des acheteurs du tableau attribué à l’entourage de Goya chez Sotheby’s. D’ailleurs, malgré la sélectivité ambiante, les ventes publiques battent le rappel des amateurs alors que les galeries restent désespérément déserts.
La réserve vaut moins côté contemporain. Les exposants français de l’Armory Show affichaient des résultats « relativement » bons, voire effervescents dans le cas d’Art:Concept et d’Anne de Villepoix. Mais, comme souvent, il ne fleure pas bon montrer des artistes français à l’étranger. De fait, Anne de Villepoix n’en a présenté aucun à New York. Artbrussels offrait, elle, un bon panorama de la scène contemporaine, mais manquait de piquant. Exception faite de la Foire de Bâle, le contemporain ne se vend que dans une certaine gamme de prix. Le seuil psychologique des collectionneurs européens excède rarement les 10 000 ou 30 000 euros. Ce plafond ne désespère pas Sotheby’s et Christie’s qui concoctent déjà leurs futures ventes françaises en la matière. Les autres acteurs parisiens n’ont qu’à bien se tenir !

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°191 du 16 avril 2004, avec le titre suivant : Les particuliers plus actifs que les marchands

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